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Les industries t l'administration de l'armement en France sous l'occupation.
Paradoxalement le grand flux international de travaux depuis les années 1960 sur la France sous l'Occupation allemande et italienne a pour l'essentiel laissé de côté les industries et l’administration de l’armement.
Deux raisons différentes peuvent être données : le fait que si les Allemands avaient engagé dès le 13 juin 1940 une politique de « sous-traitance » de commandes par les usines d'armement françaises, leurs exigences n'ont grandi que progressivement ; l’existence de récits valorisants ou justificateurs produits par nombre d’industriels, d’ingénieurs et de hauts fonctionnaires ou militaires. Même parmi les approches développées à l’échelle européenne ou mondiale depuis le début des années 2010, peu se sont focalisées sur l’armement. En revanche, le présent ensemble d’articles donne un coup de projecteur sur la mobilisation par les Occupants des ressources et capacités de la France défaite en matière d’armement. Il en présente les évolutions et les résultats comme le produit des interactions successives entre occupants et occupés. Il traite de trois domaines stratégiques : les arsenaux terrestres et maritimes, les poudres et explosifs, l’aéronautique. On cerne ainsi les pressions des autorités allemandes pour tenter de maintenir la production et la productivité malgré les multiples pénuries, et leur volonté de capter les compétences techniques et les innovations françaises. On mesure la gamme des choix possibles pour les dirigeants français des entreprises et administrations étudiées, de la collaboration et de l’exclusion des Juifs à la résistance ou au départ. On saisit comment une fraction des hommes et femmes au travail et de la population prennent des risques pour contrecarrer les commandes et entrer dans des syndicats ou des réseaux clandestins. Le secteur de l’armement sort affaibli de l’Occupation, et, au-delà de l’épuration et des réorganisations qui suivent, la France met du temps à faire des choix cohérents concernant la politique de produits nouveaux et de rapports entre science et industrie concernant l’armement. Cette histoire est à poursuivre.