L’INNOVATION : L’ARBRE DE VIE
L’Innovation est un enjeu crucial pour une société de haute technologie comme SAGEM. Équipementier aéronautique et défense du Groupe SAFRAN, SAGEM maîtrise trois grandes technologies de souveraineté dont la performance contribue fortement à la supériorité de nombreux systèmes d’armes sur le champ de bataille : l’optronique, la navigation inertielle et l’électronique embarquée critique. Ces technologies, souvent combinées au sein d’un même équipement, apportent des synergies différenciantes dans l’efficacité de la chaîne opérationnelle « sensor to shooter », depuis les dispositifs de détection et de géolocalisation précise des cibles, jusqu’au guidage des armements. Cela dit, la concurrence internationale est forte et la capacité à anticiper et à innover reste un levier indispensable de compétitivité et de croissance. Chez SAGEM, le budget de R&T et d’innovation s’élève à un niveau significatif d’environ 3,5 % du chiffre d’affaires.
La stratégie, la R&T et l’innovation
Je définirais simplement l’innovation comme une démarche globale de l’entreprise qui vise, en cohérence avec sa stratégie, à la mettre en capacité de proposer au marché une offre produit ou service différenciante. Cette définition a l’avantage de rappeler que l’innovation est une invention qui doit être portée sur le marché, et donc répondre à un besoin de marché existant ou à révéler. Parallèlement, la R&T peut parfois relever d’une démarche plus « techno-push », notamment lorsqu’elle est développée dans une logique de performance ultime. Les cycles de développement de l’innovation produit et de l’innovation technologique sont souvent très différents. Chez SAGEM, il n’est pas rare qu’une technologie, comme un gyroscope, arrive à maturité sur un temps très long, typiquement 10 à 20 ans, alors que les produits, comme une centrale inertielle par exemple, se développent sur un horizon plus court, classiquement 2 à 5 ans.
Le développement d’une brique technologique requiert donc des ressources considérables, et il devient dès lors indispensable d’optimiser la R&T en généralisant une logique de modules communs réutilisables. Cette R&T nourrit alors la démarche d’innovation, qui va chercher à intégrer ces différentes briques de manière astucieuse pour créer de la valeur et de la différenciation. Un exemple concret de ce type d’approche est le domaine de l’optronique chez SAGEM, où des modules, optiques, senseurs, caméras, électroniques, modules de stabilisation inertielle, ou encore modules logiciels de traitement d’image, ont été développés pour répondre aux besoins de trois grandes familles de produits : l’optronique portable, les caméras et les viseurs gyrostabilisés air, terre, mer. Cette logique de « chaîne alimentaire » permet d’amortir les coûts non récurrents des briques sur des volumes produit plus larges et ainsi d’optimiser la précieuse capacité d’autofinancement.
Innover : une nécessité de tous les instants
On a l’habitude de distinguer schématiquement trois grands domaines d’application de l’innovation. Un domaine « cœur de métier », qui constitue la zone de confort naturelle dans laquelle se fait l’évolution incrémentale des produits, un domaine « adjacent » où l’on va chercher à introduire des nouveaux produits dans les marchés usuels ou à étendre les offres existantes à des marchés connexes, et enfin un domaine « transformant », où se créent de nouveaux marchés avec des produits particulièrement innovants.
Chez SAGEM, comme souvent dans l’industrie, l’innovation cœur de métier se pratique assez naturellement au sein des « business units » dans une logique de ligne de produit. On vise en permanence à intégrer le retour d’expérience commercial, l’analyse marketing, les évolutions technologiques autour des compétences cœur de métier, et à généraliser des démarches plus méthodologiques de type CCXO (conception à coût et paramètres objectif), indispensables pour renforcer la compétitivité des produits et le « time to market ».
La « chaîne alimentaire » SAGEM – Depuis les briques technologies vers les équipements et les systèmes
A l’inverse, l’innovation « transformante » est le domaine de prédilection des start-up, et moins souvent celui de l’industrie parce qu’il y est structurellement plus difficile d’investir sur des enjeux non cœur de métier historique, notamment si les risques sont élevés. Il est encore plus difficile d’anticiper et de préparer la fin de vie de ses propres produits ou de son propre business model. Cela ne veut pas dire pour autant que ce type de démarche est complètement ignoré, ce qui serait dangereux. Il existe chez SAGEM un dispositif de veille qui permet d’alerter sur l’émergence de ruptures technologiques impactant nos activités, et notamment celles qui « banaliseraient » notre capacité de différenciation. En outre, la démarche stratégique intègre des scénarios de rupture pour anticiper les conséquences, et même si cela reste exceptionnel, des « taskforces » peuvent être mobilisées, parfois isolées à dessein pour répondre à un impératif d’agilité, afin de relever un challenge particulier. Enfin, l’accès à de nouveaux marchés ou à une technologie en rupture, dont le développement industriel requiert un adossement à une grande entreprise, peut se faire via une démarche de fusion - acquisition telle qu’elle se pratique dans un grand groupe comme SAFRAN. Ce fut le cas en 2013, avec l’acquisition par SAGEM de Colibrys, une des seules fonderies silicium en Europe dans le domaine des senseurs inertiels MEMS de haute performance.
Vers un « management de l’innovation adjacente »
Le cœur de cible de la démarche dite « d’innovation » est en réalité celui de l’innovation « adjacente ». L’objectif pour un équipementier comme SAGEM, au cœur de technologies transverses de positionnement, de visionique, et d’électronique embarquée, est d’élargir ses chaînes fonctionnelles sur l’ensemble des plateformes civiles et militaires. Parmi les enjeux clés de SAGEM, se trouve la capacité de combiner ces technologies pour offrir des architectures ou des fonctions innovantes et différenciantes, intégrant par exemple fusion et hybridation multisenseurs ou la réalité augmentée, pour le guidage pilotage sécurisé, l’autonomisation ou encore la protection des plates-formes. Dans ces domaines, l’expertise d’ingénierie des systèmes et des logiciels complexes est une compétence clé. Ces enjeux s’appliquent par exemple aux drones, civils et militaires, sur lesquels SAGEM a une expérience de plus de 25 ans, et est l’un des acteurs clés du Conseil des Drones civils, mais aussi à l’émergence des véhicules autonomes, au travers d’un partenariat structurant de type « Open Innovation » Safran - Valeo, dans lequel SAGEM intervient sur la vision tout temps et la géolocalisation précise. Un autre exemple est celui du BlueNaute, un gyrocompas pour la marine marchande sur une base technologique GRH (cf. encadré), dont l’immense avantage pour les armateurs est de réduire drastiquement le coût de la maintenance. Ce type d’innovation procède d’une démarche d’entreprise collaborative assez classique, allant de séances de créativité jusqu’à une conception préliminaire et un business plan, mais qui doit être impulsée et pilotée par le top management, car les enjeux opérationnels de court terme ont tendance à prendre le dessus sur les enjeux de plus long terme. Étant liée à une certaine prise de risque, il faut encourager, récompenser, et favoriser la culture de l’innovation, tout en arbitrant in fine les ressources d’autofinancement.
Les différents domaines de l’innovation
L’innovation est comme un arbre de vie. Elle est indispensable à la compétitivité et au développement d’une entreprise industrielle et technologique comme SAGEM. Pour la favoriser, il faut fertiliser un terreau fait d’acteurs ayant la culture de l’innovation par des méthodes et rituels collaboratifs. Pour la faire croître, il faut la piloter au plus haut niveau de l’entreprise, et allouer des ressources permettant de transformer raisonnablement une idée en vraie opportunité de business. Alors l’arbre donnera ses fruits qui nourriront la croissance future de l’entreprise.
Le GRH, une innovation de rupture pour la navigation inertielle Un bon exemple chez SAGEM d’innovation est le Gyroscope Résonnant Hémisphérique (GRH), un gyroscope vibrant dont la précision, la compacité et la fiabilité représentent une véritable rupture dans le domaine de la navigation inertielle. Le développement d’une telle technologie pour l’amener au niveau de maturité technique et industrielle où elle se trouve aujourd’hui représente près de 20 ans d’investissements, incluant l’édification à Montluçon de l’usine Coriolis, une unité de production ultra moderne, de classe mondiale, pour la fabrication des systèmes inertiels de SAGEM.
Le Gyroscope Résonnant Hémisphérique, une innovation technologique majeure de SAGEM |
Hervé Bouaziz
Hervé Bouaziz, ICA , Directeur de la stratégie et du business development SAGEM Hervé Bouaziz (X88 – SupAéro) a commencé sa carrière à la DGA, où il sera Directeur des programmes Mirage 2000 N et D. Après avoir été attaché d’armement adjoint à l’ambassade de France à Washington, il devient chef de la Division des systèmes de forces du Centre d’Analyse de Défense en 2008 avant d’entrer chez Safran comme Adjoint au Directeur général Défense et Sécurité et de prendre ses fonctions actuelles chez Sagem en 2013.
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