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Mo 120RT en position - Canjuers, le lundi 14 mars 2016 - Crédit photo : Bernard AMRHEIN (TDA)
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01 juin 2016

Le mortier de campagne
Perspectives d’une arme désormais centenaire

Publié par Bernard AMRHEIN | N° 109 - Terrestre : la mutation

C’est sur le front et dans la boue des tranchées qu’Edgar William Brandt esquisse, en 1915, les plans d’un obusier léger et mobile destiné à l’appui au contact de l’infanterie de ligne. Depuis lors, l’armée de Terre a toujours eu recours au mortier de campagne, une arme sans cesse renouvelée et promise à un nouvel avenir.


Le mortier Rayé/Tracté (RT)

Inventé en 1961 et mis au point par l’ingénieur Roger Crépin et son équipe, le mortier de 120 mm Rayé/Tracté Hotchkiss-Brandt est toujours unique dans son genre. Considéré par certains comme le meilleur mortier du monde, il est en service dans vingt-cinq pays, dont cinq nations de l’OTAN, et constitue l’échelon d’intervention d’urgence en appuis - feux par excellence. Éminemment projetable par diverses méthodes, il est très robuste et tire un panel de cinq types de munitions particulièrement efficaces. Doté d’un tube réputé inusable, le Mo 120 RT est aussi un lanceur parfait, et indémodable.

Mieux vaut donc perfectionner la véritable arme de l’artilleur qu’est la munition. C’est pourquoi TDA a entrepris, sous l’égide de la DGA, de transformer les projectiles existants, de 81 comme de 120 mm, afin de les rendre insensibles, en particulier aux agressions et de les doter de fusées à double sécurité. Il s’agit d’élever le niveau de sécurité des servants, tout en conservant des performances nominales. Ce chantier a aussi été mis à profit pour affiner le design des munitions de mortiers afin de réduire la portée minimale à 900 mètres, et d’augmenter la portée maximale à 8 600 mètres.

Enfin, dans le cadre de la lutte contre le gaspillage et afin de gagner du temps dans les phases de déconditionnement et de reconditionnement, TDA a complètement repensé l’emballage des munitions de mortiers. À très court terme, les caisses en bois seront remplacées par des conteneurs individuels en plastique rigide s’emboîtant les uns dans les autres et palettisés. Ainsi, là où il fallait près de quarante-cinq secondes pour accéder à une munition prête au tir, il n’en faudra plus que trois, sans génération d’un quelconque déchet tandis que transports logistiques et manutention seront allégés.

 

Le mortier Rayé/Embarqué (RE)

Lancée en 1993, la version embarquée du Mo 120 RT est développée et mise au point par TDA, sur fonds propres. Il s’agit essentiellement d’adapter le tube rayé sur un affût capable d’encaisser le recul au moment du tir, d’utiliser toute la gamme des munitions préexistantes, et d’intégrer ce nouveau système d’arme sur le véhicule blindé 6 x 6 ou 8 x 8 sélectionné par le client final. Aujourd’hui, cette arme équipe l’Arabie Saoudite, l’Italie, la Malaisie et le Sultanat d’Oman. Au fil des ans, le concept s’affine et de nouvelles fonctionnalités permettent d’envisager un emploi tactique très dynamique.

Dès réception d’un ordre de tir via un système de gestion des feux performant, le véhicule ouvre les deux trappes de toit tout en rejoignant une position de tir de circonstance. Une fois à l’arrêt, la pièce rallie automatiquement les éléments de tir, l’artificier-chargeur dépose le premier projectile sur un berceau, qui le déplace vers l’avant du tube, où un dispositif de chargement agrippe le projectile pour l’introduire dans la bouche à feu. La pièce peut tirer jusqu’à dix coups en une minute, puis sort de batterie tout en ramenant la pièce en position de route et en refermant ses trappes.

 

Mortier de 120 rayé (2R2M) à OMAN - Crédit photo : TDA ARMEMENTS SAS

 

Cela signifie que la pièce a quitté sa position avant même que le premier coup n’atteigne son objectif, ce qui rend techniquement impossible tout tir de contrebatterie. Pouvant effectuer des tirs d’efficacité d’emblée en section ou en solo, le Mo 120 RE offre une précision deux fois supérieure à celle du système de 120 mm rayé et la mobilité d’un véhicule blindé assurant la protection d’un équipage réduit à quatre membres. Capable d’emporter de quarante à quatre-vingts projectiles prêts au tir, il est donc particulièrement autonome et opérationnel pendant les phases de combat de haute intensité.

 

Vers le « tir au but »

Aujourd’hui, il reste nécessaire de tirer en salves ou en rafales pour encadrer l’objectif et garantir un effet militaire de destruction ou de neutralisation par recoupement de plusieurs rayons de létalité d’une cinquantaine de mètres environ. Les combats modernes ayant de grandes chances de se dérouler dans des zones urbanisées, il devient nécessaire, voire indispensable, d’adopter une munition guidée de mortier (MGM) arrivant sur objectif avec une précision théorique inférieure au mètre et emportant une charge militaire optimisée pour ne produire que des effets collatéraux extrêmement réduits.

 

Munition guidée de mortier (MGM) - Crédit photo : TDA ARMEMENTS SAS

 

Les unités d’infanterie déployées en Afghanistan ont toutes été accrochées à l’abord d’un hameau ou d’un village, ce qui interdisait l’emploi des projectiles de mortier ou d’artillerie à trajectoire balistique à forte dispersion et aux effets particulièrement létaux. Avec la MGM, il deviendra possible de détruire une cible à haute valeur ajoutée (High Value Target [HWT]) retranchée dans une maison, de traiter un élément embusqué juste avant un assaut par les troupes amies chargées de le réduire, voire de suivre la progression d’un élément (ou d’un véhicule) se déplaçant à très faible allure.

Pour l’heure, l’artillerie effectue du tir sur pôle(s), un pôle correspondant à une section d’infanterie ou de trois véhicules disséminés sur le terrain. Le traitement d’un pôle nécessite le tir de six à huit projectiles selon que la section d’artillerie dispose de trois ou de quatre mortiers. De nombreux objectif pouvant être traités, à l’avenir, par une MGM, le poids logistique des unités d’appuis - feux pourra être réduit de manière drastique.

 

Héritière de l’esprit d’innovation d’Edgar Brandt, TDA Armements continue d’améliorer la sécurité et la précision de ses systèmes d’armes. Implantée à LA-FERTÉ-SAINT-AUBIN (Loiret), elle est dirigée par Pierre Bénard (ICA), qui anime également la Business Line Armements et Véhicules Protégés du groupe Thales.

 

    
Bernard Amrhein, Général, Conseiller opérationnel TDA ARMEMENTS SAS
Saint-Cyrien, le Général Bernard Amrhein est artilleur de montagne et officier breveté de la FührungsAkademie der Bundeswehr. Après une carrière essentiellement opérationnelle, il rejoint TDA Armements SAS en juin 2013 comme conseiller opérationnel et devient Conseiller communication, chargé de la politique sociétale de l’entreprise en janvier 2015.
 

Auteur

Bernard AMRHEIN
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