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Le badge commando: pas un cadeau de Noël mais plutôt le certificat des souffrances endurées,
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31 janvier 2021

J'AI CHOISI LES COMMANDOS
UNE PHRASE TEMERAIRE !

 L’X proposant des formations humaines et militaires dans les commandos, avec à la clef le fameux «STAC», un camarade raconte une certaine surprise initiale après l’avoir choisie: «mais ça va pas la tête !» . Puis comment tout cela lui a été bien utile... plus tard. Et comment il y est revenu... après.


«J’ai choisi les commandos marine»

Durant les années de classes prépas en côtoyant les camarades qui avaient déjà intégré, à peine conscient que la vie dans les grandes écoles ouvrirait nos esprits «confinés», nous étions loin de réaliser le séisme que serait pour nous la 1re année de vie militaire ; surtout pour les quelques-uns qui allaient partir dans la foulée en formation commando !
 
Fin septembre 1986, après un mois de préparation, à l’appel de mon nom, j’ai entendu une voix étrange (la mienne?) qui prononçait de façon incertaine, mais forte: «j’ai choisi les commandos marine». En fait, les officiers mariniers en charge du parcours d’obstacles du camp de la COURTINE avaient réussi à me mettre cette phrase dans la tête, tout en me faisant rêver à la vie de James Bond qui m’attendait…

L’embarcation rapide des commandos: on en sort trempé et frigorifié surtout en pleine nuit !

L’embarcation rapide des commandos : on en sort trempé et frigorifié surtout en pleine nuit !

 

«Souffre et tais-toi»

C’est donc totalement inconscient que je me suis retrouvé débarquer un matin très tôt sur le quai de la gare de Lorient. Le jour même, j’ai pris en cours de route le stage des élèves officiers de réserve Fusiliers Commandos (EOR FUSCO), commencé depuis un bon mois et qui consistait en une interminable série d’épreuves physiques, jusqu’à l’apothéose finale du stage de parachutisme.
- Les week-ends de retour en famille toujours promis mais qui n’arrivaient jamais parce que tel camarade avait soi-disant mal rangé son armoire .…
- Le «jogging» du lundi matin, avec comme ligne d’arrivée un camion à ridelle, de type GBC180, posté à seulement 8km du point de départ, mais qui avançait tout doucement à 5km/h,... une prime à celui qui court le plus vite, assez représentative de la vie plus tard…
- Les épisodes particulièrement redoutés du passage dans la «cuve» (photo), qui consistaient à tâtonner pour chercher l’hypothétique sortie d’un labyrinthe de tubes immergés dans une eau glacée et sombre
- La semaine de stage «survie» sur l’îlot Saint-Michel, face à Lorient, dont on était heureux qu’il abrite des rats, et attire les mouettes... Je ne regarderai plus jamais de ma vie un plat de pâtes de la même façon…

«Le commandement d’une escouade de 18 guerriers professionnels»

Après la remise du fameux badge commando fin décembre, le pacha FUSCO me confiera le commandement d’une escouade de 18 guerriers professionnels, tous très affutés, beaucoup plus âgés que moi, et certains un peu voyous. Heureusement, avec le paquetage, venait un adjoint de choc, sans lequel je n’aurais pas tenu, et au-dessus de moi, un officier supérieur retaillé, futur amiral, qui a commandé sans faillir «bord gauche, bord droit», mais a aussi fait preuve d’un sens aigu de la bienveillance. Je n’ai jamais retrouvé ensuite cette configuration idéale dans ma carrière militaire ou privée, mais cela m’a bien aidé à démarrer.

La cuve: l’épilogue impitoyable des sorties terrain. Eau glacée, sans visibilité et il y a plein de choses à aller chercher au fond en étant simplement vêtu d’un treillis

La cuve : l’épilogue impitoyable des sorties terrain. Eau glacée, sans visibilité et il y a plein de choses à aller chercher au fond en étant simplement vêtu d’un treillis.

 

«La Reine et le Roi»

Au cours de mes six mois en unité, j’ai découvert qu’il existait un club international très fermé des opérations spéciales, avec notamment les britanniques qui les ont inventées et les jordaniens dont le Roi actuel a été pacha des FS de son pays. Je me remémore en particulier les sauts à la mer en Chinook avec les briefings accélérés des Royal Marines, maladroitement traduits pendant le vol par l’aspirant que j’étais à des commandos français pas encore anglophones. A cette occasion, j’ai appris, lorsque ma carrière d’officier de liaison a pris fin inopinément, qu’il ne fallait jamais parler de la Reine à un anglais.
 
En parallèle, pour un élève de prépa comme moi, l’année de formation militaire s’est traduite par un réel épanouissement personnel: permis de conduire, voiture, logement, sorties... L’année suivante, je me suis retrouvé sur le plateau de l’X, avec l’impression d’avoir pris dix ans d’expériences d’un coup, une sorte de rattrapage accéléré de nos années passées à étudier et privés de la vie des jeunes de notre âge.

L’îlot Saint Michel au large de Lorient: terrain préféré des instructeurs pour nous affamer sans possibilité de s’échapper 

L’îlot Saint Michel au large de Lorient : terrain préféré des instructeurs pour nous affamer sans possibilité de s’échapper.

 

«Tu as fait les commandos, alors tu peux le faire»

Avec le recul, la «baffe dans la gueule» de départ est devenue un socle d’acquis liant corps et esprit, assimilés petit à petit. Le goût de l’aventure et de l’adrénaline va déterminer plus tard des choix de carrière différents d’une part vers d’autres structures «spéciales» du Ministère des Armées, d’autre part vers l’expatriation; tout en ayant acquis l’expérience suffisante pour participer à un RAID GAULOISES à Madagascar et plus tard être capitaine de l’équipe «Foreign Legion» lors des raids similaires de la chaîne US DISCOVERY CHANNEL en Australie et au Maroc.
 
Par ailleurs, j’ai été ravi d’être invité régulièrement aux fameuses REMISES A NIVEAU OPÉRATIONNELLES, qui permettent de côtoyer le patron actuel du MEDEF une fois tous les deux ans lors d’interminables marches commandos de nuit dans la campagne lorientaise.
 
Il faut noter aussi que la prise de conscience de l’importance de la technicité des commandos à tous niveaux de la chaîne hiérarchique, et de leur réactivité quasi «temps réel» sans souci des nuits ou des week-ends m’a aussi été utile plus tard lors de ma période comme Chief Technology Officer dans une start-up frenchie basée à Singapour. A chaque épreuve, ma petite voix intérieure me disait: «tu as fait les commandos, alors tu peux le faire».

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