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Hybridation des engins militaires Arquus
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26 octobre 2023

DES VÉHICULES TERRESTRES HYBRIDES

Publié par Michel BOUVET (1958) et François Deloumeau - Ingénieur conseil | N° 130 - ENERGIES

Un groupe de travail du GICAT «Gestion de l’énergie opérationnelle Véhicules - Flotte - Camp» ouvert au MINARM (DGA, AID, EMAT, SEO...), au CEA et à l’ONERA, montre l’intérêt d’un rôle accru des véhicules hybrides face à l’augmentation et à la variété des besoins énergétiques sur les théâtres d’opérations.


L’énergie électrique

Pour une mission de 3 jours, un véhicule Griffon consomme environ 400 litres de gazole, c’est à dire 4300 kWh. Du fait de la moindre consommation énergétique d’une motorisation électrique (45% à 85%), le stockage d’énergie électrique nécessaire passerait à au moins 1942 kWh.

Il faudrait alors :
- 3,7 m3 et 6,6 t de batteries Lithium-ion en 2025,
- 3,3 m3 et 4,8 t de batteries Solid Lithium-ion en 2030,
- 2,8 m3 et 4 t de batteries Ce qui rend ce type de stockage d’énergie difficile à mettre en œuvre pour des véhicules de combat,
ce qui rend ce type de stockage difficile à mettre en œuvre pour des véhicules de combat.

Carburants fossiles, exotiques, synthétiques et biocarburants

Pour les plus gros véhicules, le carburéacteur, avec l’adjonction d’additifs, restera donc le carburant unique dans les 30 à 50 ans à venir. La possibilité d’utiliser des carburants exotiques locaux comportant entre autres des teneurs en soufre importantes devra être maintenue.

Le e-kérosène (e-fuel), produit à partir d’hydrogène et de CO2, fera progressivement son apparition au rythme de son utilisation pour l’aéronautique civile. Son coût, les capacités de production et le bilan énergétique pour le produire restent des problématiques à surmonter.

Les biocarburants (traitement d’huiles de cuisson usagées, de déchets de bois…), 80% moins émetteurs de CO2 que le kérosène, viendront progressivement remplacer les carburants fossiles. Pour mémoire, Air France vise à intégrer 60% de ces carburants à l’horizon 2050. Son coût reste toutefois 3 à 8 fois supérieur à celui des carburants fossiles à ce jour et les sources d’approvisionnement sont très limitées.

La seule solution de stockage d’énergie majoritaire dans le domaine terrestre dans les 20 à 30 ans à venir restera les carburants fossiles, exotiques, synthétiques ou biocarburants.

Hybridation des engins d’engagement au contact

Cependant, le besoin en énergie électrique en lien avec les engins d’engagement pose de nombreuses questions :

- Quelle réduction de la consommation énergétique des plateformes ?
- Quelle production de l’énergie électrique pour satisfaire aux besoins énergétiques des systèmes embarqués et débarqués ?
- Quelle alimentation en énergie des drones terrestres et aériens et des engins électriques qui arriveront sur le théâtre d’opération ?
- Quel maintien ou de l’amélioration des temps de veille silencieuses malgré l’accroissement constant de la consommation des équipements embarqués ?
- Quelle amélioration de la résilience énergétique des systèmes ?
- Quel déplacement de certains engins à basse vitesse en mode furtif ?
- Quelles opérations de maintenance, et quelle gestion de la diversité des parcs ?

Cela a donné lieu à des expérimentations variées, par exemple :
- La dotation de groupe moto propulseur de génératrices de forte puissance
- Le remplacement des batteries au plomb par des batteries Lithium-Ion
- L’adjonction de groupe électrogènes embarqués
- L’hybridation des matériels.

S’agissant de cette dernière approche, les gains en consommation en déplacement, et selon les architectures d’hybridation retenues, peuvent atteindre jusqu’à 20%. Ces gains additionnés aux gains obtenus avec le stop and start peuvent atteindre jusqu’à plus de 40%. L’impact sur les masses est compensé par le downsizing des moteurs thermiques. Le démonstrateur ELECTER a montré la robustesse de l’adjonction d’une hybridation sur une chaîne cinématique classique (« 0 » incident sur 18 mois d’expérimentation). Seule une attention particulière sur le maintien en charge de la batterie de traction quand les matériels seront stockés sur une longue durée est à prévoir, en évitant le seuil de décharge profonde.

Les architectures d’hybridation candidates

Hybridation série
Depuis de nombreuses années, cette architecture reste pour plus d’un séduisante : on place où on veut (ou plutôt où on peut) un moteur thermique associé à une génératrice de puissance et on alimente un ou plusieurs moteurs électriques selon les contraintes d’intégration.

Un moteur électrique alimente :
- soit une chaîne cinématique unique (solution traditionnelle)
- soit chaque pont ou barbotin
- soit chaque roue.

Schéma d’une hybridation série

Schéma d’une hybridation série

Hybridation parallèle
Le principe consiste à rajouter, en parallèle à un moteur thermique, une machine électrique de forte capacité capable de fonctionner en symbiose avec le moteur thermique.

Schéma d’une hybridation parallèle

Schéma d’une hybridation parallèle

Des perspectives d’hybridation de matériels opérationnels

L’accroissement des besoins énergétiques est constant ; L’hybridation des engins d’engagement au contact est la réponse la plus pertinente dans le contexte actuel. Pour confirmer la pertinence de cette technologie, l’étude d’un démonstrateur Griffon hybride a été notifiée à l’été 2023

La machine électrique permet de downsizer le moteur thermique car elle apporte le complément de couple et de puissance au franchissement dans les situations extrêmes. Cette solution a de nombreux avantages notamment l’augmentation de l’autonomie (jusqu’à + 67%), la réduction de la consommation (jusqu’à -40%), l’amélioration de la production d’énergie pour d’autres usages : smart grid locale, rechargement de drones, temps de veille silencieuse ou résilience énergétique.

L’hybridation de certains camions tactiques ou logistiques pourrait aussi répondre à la question de l’énergie embarquée notamment pour les véhicules de transport de systèmes à forte consommation énergétique (transmissions, surveillance, guerre électronique, systèmes de défense sol/air, citerniers,…) Pour les engins actuellement en service, l’hybridation parallèle de l’ensemble de ces engins est envisageable en rétrofit, et p.

Nul doute que l’hybridation des véhicules terrestres militaires va se développer dans les années à venir compte tenu des nombreux avantages apportés

Si cette solution technique est parfaitement justifiée pour des matériels terrestres à forts besoins énergétiques, elle doit être analysée sur les autres matériels du fait du son coût (environ + 10% sur le coût des plateformes hors protection et systèmes embarqués) et doit être traitée comme une variante sur une gamme de véhicules plutôt que comme équipement de base.

Photo de l auteur
François Deloumeau, expert

François DELOUMEAU est Directeur de l’Advanced Engineering d’ARQUUS. Il assure au sein de cette société l’expertise dans le domaine des énergies embarquée et débarquée et des nouvelles énergies.

Photo de l auteur
Michel Bouvet, IGA

Michel Bouvet a occupé divers postes de direction ou de direction générale au sein du ministère de la défense (SHOM, DAS, DGA) et dans le monde de la recherche publique (IRSN, DGRI, IRD). Il est désormais consultant au profit du GICAT.

Auteurs

François Deloumeau - Ingénieur conseil
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