En relisant cette prose, nous pressentions déjà les progrès techniques, les difficultés éthiques et les développements à venir, à susciter, à décider. Nous y trouvions déjà : une préface du CEMA, un panorama des drones des différents milieux, les besoins opérationnels, les projets avancés, du nEUROn au Héron en passant par Boston Dynamics et un projet de MALE européen…, sans oublier une élection présidentielle !

A la fois rien n’a changé, et pourtant, que de transformations, de Tesla à la première guerre robotisée dont vous lirez un Retex dans ces pages.

Les drones et robots nous posent la question fondamentale de l’autonomie. Il existe comme le souligne Catherine Teissier une confusion sémantique : s’agit-il d’une capacité à enchainer des actions individuelles, comme se saisir d’une tasse de café, ou une capacité à concevoir des réponses à des environnements nouveaux ? S’agit-il d’une séquence préprogrammée avec des choix, ou d’une réflexion en conscience devant une décision ayant des enjeux éthiques.

C’est d’abord à nous que la question est posée : comment vivons-nous cette autonomie, et quel sens donnons-nous à nos actions, à nos engagements ? 

1/ Inutile d’entrer dans la pleine conscience de chacune de nos actions, nous avons besoin d’une automatisation de nos routines et habitudes pour simplement vivre. Cette autonomie se construit depuis la petite enfance et lorsqu’elle se perd, il est bien difficile de la reprogrammer…

2/ Nous avons la responsabilité d’infléchir ces enchaînements en cas d’urgence. Ces dilemmes dans le feu de l’action correspondent à une éducation des consciences, une culture. The moral machine experiment publiée en 2018 dans Nature étudie des dilemmes liés à la voiture autonome auprès de 40 millions de personnes. Les résultats varient par région, mais on préfère écraser un criminel plutôt qu’un chien… Les premiers accidents de véhicules autonomes montrent la très grande difficulté de les modéliser.

3/ En amont de cet agir, même complexe, se trouve la réflexion préalable, celle qui s’élabore dans le silence, celle qui permet de trouver du sens. Quelle finalité est-ce que je vise ? Est-elle légitime ? Dans le secteur de l’armement, il est difficile de faire l’impasse sur ces questions, qui peuvent être éclairées par les principes de La guerre juste de Thomas d’Aquin. C’est aussi l’occasion de creuser les niveaux de sens ; A quel problème global est-ce que je réponds ? Dans quelle direction cela me fait-il progresser ? Quelle est mon utilité ?

Nous constatons que beaucoup de jeunes diplômés répondent positivement à ces questions, puisque le corps de l’Armement séduit les élèves de Polytechnique, dont il est aujourd’hui le premier recruteur, les diplômés d’autres grandes écoles et des ENS (dont Ulm cette année) tandis que le concours interne attire de nombreux candidats. Les ingénieurs de l’armement ne manquent donc pas de vitalité, et cela se traduit, j’espère, dans notre magazine.

En attendant une évolution dans les mois qui viennent pour mieux prendre en compte vos aspirations, nous avons refondu le processus de mise en ligne pour vous permettre de profiter des magazines 104 à 124 sur notre site www.caia.net dès aujourd’hui, et en particulier le 105 sur les robots… N’hésitez pas à nous écrire pour donner votre avis.