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Détonation d’une charge explosive à proximité d’éléments structuraux de type poteaux en béton armé
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12 juin 2022

DÉTONIQUE ET EFFETS DES CHARGES CONVENTIONNELLES AU CEA-GRAMAT

Depuis l’origine, le Centre d’Etudes de Gramat (CEG), aujourd’hui CEA-Gramat, a développé ses compétences et son expertise en détonique, vocable regroupant l’ensemble des études sur la physique des explosifs et leurs effets, via une démarche scientifique alliant modélisation, simulation numérique et validation expérimentale. Cette expertise unique est notamment mise au profit de la Défense pour l’évaluation souveraine de l’efficacité des armements conventionnels.


CEG : une histoire singulière

La géologie particulière du Lot a conduit l’État, à la fin de la seconde guerre mondiale, à envisager l’utilisation du gouffre de Bèdes près de Gramat comme site d’essais. Initialement imaginé pour tester les moteurs des fusées V2 récupérées en Allemagne, le site a finalement été dédié à la réalisation d’expériences de détonique indispensables pour la compréhension et la maîtrise de la phase pyrotechnique initiale du fonctionnement d’une arme nucléaire. Site expérimental de la Section atomique de la Direction des Etudes et Fabrications d’Armements (DEFA, ancêtre de la DGA) dès 1951, le CEG est officiellement créé le 31 décembre 1959. 

Parallèlement, à partir de 1965, débutent les activités de durcissement. Il s’agit d’étudier la tenue des matériels et installations aux effets militaires des explosions nucléaires : effets de souffle puis effets thermiques, élargis aux effets électromagnétiques à partir de 1975. A la fin des années 70, le CEG a ainsi développé de nombreux outils de simulation numérique et de validation expérimentale. Naturellement, ils sont alors exploités pour des applications conventionnelles, les compétences scientifiques associées étant duales. 

Transfert du centre vers le CEA et élargissement de son champ d’expertise

Dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, le CEG et ses activités d’expertise sont transférés le 1er janvier 2010 de la DGA au CEA et rattachés à Direction des Applications Militaires.

Au-delà des activités sur le nucléaire de défense, les activités d’assistance à maîtrise d’ouvrage auprès de la DGA et d’expertise étatique au profit de la Défense dans le domaine conventionnel sont désormais conduites dans le cadre d’une convention CEA/DGA qui couvre deux domaines : les charges militaires et les armes à énergie dirigée, électromagnétique ou laser. Cette activité constitue désormais une nouvelle mission du CEA/DAM.

L’action du centre porte à la fois sur l’évaluation de l’efficacité des armements et sur la vulnérabilité de systèmes d’armes ou d’infrastructures face à leur emploi potentiel.

 

Comparaison expérience/simulation pour une configuration de détonation d’une charge explosive à proximité d’éléments structuraux de type poteaux en béton armé. 

Au travers d’une démarche concertée, prospective et structurée avec la Défense, le CEA-Gramat participe à la préparation de l’avenir en aidant à la spécification des charges des futurs armements pour les dimensionner au regard des effets recherchés. Il apporte également aux forces armées son expertise pour les armements en service en vue d’anticiper et de maîtriser leur emploi sur les théâtres d’opérations. 

Dédié historiquement au domaine des armements du combat aérien (missile de croisière, missiles air/air, bombes d’aviation…), et sur demande de la DGA, le domaine d’action est élargi en 2021 au domaine aéroterrestre. Le CEA-Gramat devient en conséquence le centre d’expertise étatique pour l’ensemble des armements conventionnels en service ou en développement.

Modélisation des explosifs à effets de souffle renforcés (thermobariques)

Les phénomènes de post-combustion (combustion anaérobie d’additifs métalliques en aval du front de détonation et combustion aérobie de ces additifs et des produits de détonation avec l’oxygène de l’air) peuvent représenter jusqu’à trois fois l’énergie de détonation pour les explosifs thermobariques. Leur modélisation est donc essentielle. Des simulations fines d’écoulements turbulents de type Large Eddy Simulation ont permis de comprendre et modéliser la zone de mélange située en bordure de la boule de feu, siège d’instabilités hydrodynamiques pilotant le mélange air-produits de détonation. Un modèle réduit de mélange turbulent a ainsi été implémenté dans OURANOS pour améliorer la simulation de la post-combustion des produits de détonation. Les travaux de recherche se focalisent désormais sur la modélisation de la combustion des additifs métalliques. 

 

La plateforme de simulation des effets des charges conventionnelle 

Pour entretenir et développer son expertise dans le domaine des charges conventionnelles, le centre adopte une démarche de simulation – démarche scientifique itérative de modélisation physique, de simulation numérique et de validation expérimentale inspirée de celle qui est mise en œuvre au profit des armes nucléaires. Cette démarche est basée sur l’utilisation d’une plateforme de simulation pour l’expertise des effets et de la vulnérabilité des systèmes.

Tout d’abord, les modèles physiques, décrivant les mécanismes d’amorçage des explosifs, la propagation de la détonation et le comportement dynamique des matériaux connexes, sont affinés et calibrés en s’appuyant sur des expérimentations maîtrisées et fortement instrumentées, utilisant des métrologies de pointe pour mesurer précisément des phénomènes ultra-rapides et extrêmes. Pour ce faire, le centre dispose de « dalles pyrotechniques » permettant de mettre en œuvre plusieurs dizaines de kilogrammes d’explosif, ainsi que des lanceurs permettant de couvrir une large gamme de sollicitations. Les enjeux principaux concernent la compréhension des phénomènes de transition réactive des explosifs sous sollicitations mécaniques ou thermiques, de post-combustion (cf. encadré) et de fragmentation dynamique des matériaux connexes.

Ensuite, ces modèles sont intégrés dans des logiciels de simulation numérique. Deux codes de référence sont notamment développés au CEA/DAM et mis à la disposition de la communauté Défense : le code de thermochimie SIAME, permettant de décrire l’explosif et l’état de ses produits de détonation, et le code de dynamique rapide OURANOS, permettant de simuler le fonctionnement d’une charge conventionnelle ou l’interaction d’une munition avec sa cible.

L’exploitation maîtrisée de ces logiciels sur des moyens de calcul « hautes performances » permet de traiter des situations de plus en plus complexes et de mieux concevoir les configurations expérimentales capables d’apporter les validations ou les démonstrations souhaitées. Le nombre de configurations d’essais de qualification peut ainsi être limité au strict nécessaire.

L’expertise du centre en détonique, essentielle pour la Défense, couvre un vaste ensemble de compétences dans des domaines scientifiques et techniques passionnants dont nous ne pouvons qu’encourager les jeunes IA à en appréhender certaines facettes à l’occasion d’une période d’ouverture au CEA-Gramat. 

 

 

 

Julien Grunenwald, ICA, CEA/DAM Gramat

X2001, Julien Grunenwald débute sa carrière au Centre d’Etudes de Gramat où il occupe différents postes dans le domaine du durcissement des systèmes stratégiques puis du comportement dynamique des matériaux. Il est actuellement adjoint d’un service d’expertise portant sur la détonique et les effets mécaniques et thermiques des armes.

 

 

 

 

Patrick Aubourg

Issu de l’Ecole de l’air (promotion 1980) et après 30 ans de carrière au sein de l’armée de l’air, Patrick Aubourg rejoint la Direction des applications militaires du CEA en 2010 pour piloter, en tant que chef de projet, l’ensemble des activités d’expertise au profit de la DGA dans le domaine des effets des armements conventionnels. 

 

Auteurs

Patrick Aubourg, CEA DAM

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