LES ESSAIS PYROTECHNIQUES À DGA ESSAIS DE MISSILES
UN SAVOIR-FAIRE AMÉLIORÉ ET MAITRISÉ DEPUIS PLUS DE 60 ANS
DGA Essais de missiles, centre référent pour les essais au sol et en vol de systèmes de missiles, réalise à la fois les essais en vol de système d’armes dans tous les milieux (terre, air, mer et sous-marin) et les essais au sol (en statique et en dynamique ), le tout en assurant la sécurité des personnes, des biens et de l’environnement. Il est implanté sur 3 sites principaux : Biscarrosse (40), Toulon-Ile-du-Levant (83) et Saint-Médard-enJalles (33).
Ce centre met en œuvre et réalise au quotidien des essais pyrotechniques au sol avec la possibilité de simuler certaines ambiances de vol(1), qui sont indispensables dans le développement et le suivi en service des missiles stratégiques et tactiques de la Défense. Ils contribuent à la fois à la sécurisation et à l’évaluation de la vulnérabilité des munitions ainsi qu’à l’évaluation de leurs performances.
Tous ces essais font appel à des techniques particulières de pyrotechnie ainsi qu’à une excellence dans l’expertise des objets pyrotechniques, un savoir-faire amélioré et maîtrisé par DGA Essais de missiles depuis plus de 60 ans.
Tir « tuyère vers le bas » d’un premier étage M51
« Mener des essais avec la matière pyrotechnique, c’est un défi au quotidien, que ce soit pour les essais au sol ou les essais en vol. Notre métier à DGA Essais de missiles demande une rigueur remarquable et des compétences techniques et managériales fortes pour accompagner les équipes, et faire en sorte que chaque essai réponde aux exigences des clients tout en maintenant une priorité majeure : la sécurité des personnes et des biens. C’est grâce à l’expertise et à la passion de chacun des personnels de DGA Essais de missiles que nous sommes un centre référent en Europe en matière d’essais pyrotechniques. », précise l’IGA Corinne Lopez, Directrice de DGA Essais de missiles.
Plus de 30 tonnes de propergol à maîtriser
En 2021, DGA Essais de missiles (DGA EM) a réalisé un essai sur un premier étage propulsif du M51. Cet essai nécessite des manipulations pyrotechniques exceptionnelles compte tenu des caractéristiques de l’engin : plus de 30 000 kg de propergol qui développent une poussée de plus de 100 tonnes, pour plus d’une minute de fonctionnement avec un flux thermique à plus de 3 500K.
La réalisation d’un tel essai au banc dans une configuration proche d’un départ missile nécessite donc une approche méthodologique rigoureuse. Chaque personnel intervenant dans le périmètre proche de ce propulseur est habilité en pyrotechnie suivant son degré d’intervention tout en respectant des procédures strictes. Avant toute intervention, chaque opération est décrite dans une analyse de sécurité. Après transfert physique du spécimen fourni par ArianeGroup (AGS) vers DGA EM en présence des contrôleurs qualité et pyrotechniciens, les opérateurs de DGA EM interviennent alors pour préparer le propulseur : équipement mesures (traçage, préparation de surface, collage de plus de 600 capteurs), équipement d’un harnais mécanique pour réaliser le transport jusqu’au pas de tir. Le convoi routier pour acheminer le propulseur équipé est exceptionnel avec son gabarit « hors norme » (masse = 250 tonnes, 28 m de long et 4 m de large). Après un cycle de préparation de 4 à 6 mois sur le banc d’essai et son conditionnement climatique, le jour J arrive enfin. Un pyrotechnicien procède au montage final des inflammateurs, dernière barrière physique de la chaîne de mise à feu. « 3,2,1, mise à feu », le tir est initié et piloté à distance à plus de 1 km du pas de tir, depuis le poste de conduite de tir où près de 1000 mesures sont envoyées. Certaines de ces mesures, dites innovantes, ont d’ailleurs été développées par DGA EM (voir plus bas).
Essai impact de balle sur propulseur
Au total, pour un essai de cette nature, les personnels de DGA EM interviennent à hauteur de 19 000 heures. Les compétences mises en œuvre sont complexes et très diverses : pyrotechniques, mesures physiques, mécanique, optique, optronique, météorologique, climatique, hydraulique, management, informatique, transport…
Ces essais majeurs pour la Défense sont une fierté pour les équipes.
« Arrivée en 1991 à l’âge de 25 ans au CAEPE (Centre d’Achèvement et d’Essais de Propulseurs et Engins) » - raconte Françoise, pyrotechnicienne et responsable d’essais à DGA Essais de missiles, « j’ai eu la chance de connaître le début du démantèlement M45 en même temps que l’arrivée des essais de muratisation. De bons souvenirs lorsque les pyrotechniciens de Toulon sont venus avec moi pour s’assurer de la respirabilité du banc d’essai après tir; nous étions munis d’un appareil respiratoire isolant (communément dénommé ARI) avec chacun 2 bouteilles d’oxygène dans le dos, c’était une première pour moi ! (Contrairement à eux qui avaient l’habitude) jusque-là rien de compliqué a priori sauf que j’ai consommé les 2 bouteilles d’oxygène quand ils n’avaient pas fini d’utiliser leur 1ère !!! Être pyrotechnicien n’est pas forcément commun car nous ne sommes pas très nombreux à exercer ce métier et être pyrotechnicienne l’est encore moins… »
Unique centre français labellisé OTAN pour les essais de sécurité
Dans le cadre de ses activités, DGA EM site Gironde est l’acteur référent dans l’évaluation de la vulnérabilité des munitions face à des agressions accidentelles ou malveillantes pouvant intervenir durant leur vie opérationnelle. Le site est labellisé OTAN dans la politique MURAT (concept OTAN visant à s’assurer d’une vulnérabilité faible des munitions) et contribue à l’homologation au transport des munitions en soutien de l’inspection des poudres et explosifs. Pour répondre à ces objectifs, il s’agit par exemple de tester la réaction d’une munition lorsqu’un incendie se déclare dans une soute, lorsqu’elle chute lors d’opérations de manutention ou lorsqu’est impactée par un projectile. Certains de ces essais permettent de s’assurer que l’objet pyrotechnique est suffisamment sûr pour être transporté par voie routière. En complément, DGA EM dispose d’outils et de compétences pour simuler numériquement chaque type d’agressions et ainsi contribuer à l’évaluation des effets occasionnés.
Ces essais de sécurité mobilisent les équipes pyrotechniques de DGA EM, qui interviennent en amont (préparation des munitions, configuration du moyen d’essai), pendant l’essai (mise à feu notamment) et après l’essai (cartographie des projectiles et élimination éventuelle des matières pyrotechniques).
Vincent, pyrotechnicien à DGA Essais de missiles en témoigne :
« Au cours de mes études, lorsqu’il a été question d’orientation, je savais qu’un métier alliant réflexion et pratique serait fait pour moi. Le domaine de la pyrotechnie m’a permis d’acquérir des compétences spécifiques et m’ouvre de belles perspectives. DGA EM me permet d’accroître mes connaissances dans ce domaine grâce au large panel d’activités (vieillissement, expertise, essai tactique et balistique…). Maintenant, pouvoir porter et suivre des projets de la toute première réunion jusqu’au traitement final du spécimen donne vraiment un sentiment de satisfaction et d’apporter une pierre à l’édifice des différents programmes nationaux. Et je suis fier d’appartenir au cercle restreint des pyrotechniciens, c’est vraiment un métier à part ! »
La simulation en appui de la sécurité pyrotechnique
La sécurité des biens et des personnes est la première priorité de DGA EM. Pour assurer cette sécurité, et en conformité avec la règlementation en vigueur, bon nombre de mesures sont mises en place face aux différents risques liés aux essais. A ce titre, des simulations réalisées en interne viennent en appui de la sécurité pyrotechnique. Ainsi, face aux risques d’explosion, qu’elles soient accidentelles ou provoquées lors des essais de sécurité, la réglementation française nous impose de définir des zones d’effets pyrotechniques qui délimitent les périmètres de sécurité. Cette réglementation autorise par ailleurs le recours à l’évaluation quantitative du risque (EQR). C’est cette voie qui a été entreprise par DGA EM avec le développement en interne des logiciels CRONOS (explosion au banc d’essai, logiciel validé sur essais échelle 1) et EVREST (explosion en configuration de stockage, logiciel issu des meilleures méthodologies de l’OTAN). Ainsi, en tenant compte des propriétés explosives particulières de nos munitions et de leurs conditions spécifiques de mise en œuvre, DGA EM procède à chaque fois à la modélisation du danger la plus pertinente possible et favorisant une gestion des coactivités optimale tout en garantissant la sécurité des biens et des personnes.
Tirs dynamiques au rail, un environnement d’essai unique en EuropeDGA Essais de missiles site Landes dispose d’un vaste complexe d’essais sol sécurisé et instrumenté comportant deux rails d’essais dynamiques et les moyens capables de faire atteindre à des charges militaires de plusieurs tonnes des vitesses relevant du domaine aéronautique (subsonique et supersonique). Tous les types de charges militaires, qu’elles soient inertes ou actives, peuvent être évalués au sol avant leur intégration dans le système d’arme utilisateur. Il est ainsi possible de visualiser le comportement de ces dispositifs, en mesurer les performances puis les qualifier dans des conditions réalistes et maitrisées. |
« Véritable fil rouge de ma carrière d’expert à la DGA » précise Yanick Garcia, Expert DGA Essais de missiles en vulnérabilité des missiles, concepteur des logiciels CRONOS et EVREST, « les effets pyrotechniques des explosions de propulseurs et de charges militaires, et en particulier les travaux de modélisation relatifs aux projections d’éclats, bien qu’initiés il y a plus d’une trentaine d’années, restent d’une modernité remarquable vis-à-vis de la sécurité des biens et des personnes. »
Innovation en matière de mesures
Témoignage de François, responsable des mesures innovantes à DGA Essais de missiles :
« Appréhender les phénomènes physiques lors d’un essai au banc passe automatiquement par une qualité sans faille de la mesure. Afin d’augmenter le catalogue des mesures pour les besoins des essais, DGA EM a mis en place une entité de recherche et développement de nouvelles techniques de mesures. Elle a pour vocation de monter en maturité des techniques qui permettront une visualisation du comportement d’un propulseur, que ce soit pour des applications externes ou internes au moteur afin d’améliorer, entre autres, les codes de prédiction des performances propulsives.
Les objectifs principaux de l’innovation dans l’instrumentation sont l’amélioration des performances de capteurs, l’amélioration de leur mise en œuvre et la miniaturisation afin de pouvoir intégrer les technologies dans des endroits non accessibles de nos jours. En terme de rupture technologique, on pourra citer la mesure de l’érosion d’un col de tuyère ou bien la mesure de phénomènes physiques à l’intérieur d’un moteur, sans fil. Dans le domaine de la mise en œuvre des chaînes de mesures, certains capteurs nécessitaient 48h pour être installés correctement ; aujourd’hui ils ont été remplacés par des capteurs que nous collons en 1 minute ! »
Ces techniques développées par DGA Essais de missiles montrent une des voies d’innovation intrinsèque au centre et cette expertise a également été mise à profit dans le domaine spatial.
1 : Voir encart sur le Moyen d’Essai en Simulation d’Altitude (MESA)
Des essais pyrotechniques en simulation d’altitudeDGA Essais de missiles site Gironde dispose d’un moyen unique en Europe occidentale lui permettant de réaliser des essais sur des 3e et 4e étages propulsifs du M51 en vol simulé. L’objectif du banc d’essai MESA (Moyen d’Essai en Simulation d’Altitude) est de recréer les conditions de vol rencontrées par les propulseurs hors atmosphère, jusqu’à 50km d’altitude.
Le fonctionnement est assez simple : il s’agit de faire le vide dans un caisson, dans lequel est installé le propulseur, grâce à l’effet venturi. Fonctionnement simple certes, mais les essais pyrotechniques en simulation d’altitude sont complexes à mettre en œuvre et témoignent des savoir-faire uniques. |
Nicolas Honorat, Responsable de la division Expertise Programmes à DGA Essais de missile L’IPETA Nicolas Honorat a débuté sa carrière DGA au Centre d’Analyse Technico-Opérationnelle de Défense, puis a rejoint la direction technique où il a contribué aux travaux amont du SCORPION et à la qualification/mise en service opérationnelle du Lance-Roquettes Unitaire. Il rejoint ensuite le service industriel de l’aéronautique en tant que responsable du programme TP400 (moteur de l’A400M). En 2021, il prend la tête de la division expertise programmes à DGA Essais de missiles |
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