INDUSTRIE ET TERRITOIRES... CONJUGUÉS PAR ARESIA
Si la réindustrialisation de la France est devenue un mot d’ordre national partagé par la plupart des responsables politiques et des Français, sa concrétisation se doit d’être adaptée à l’échelle de chaque bassin d’emploi. La réindustrialisation de l’ïle-de-France n’obéit pas aux mêmes leviers que la redynamisation du Hainaut ou de la banlieue toulousaine. La mise en place d’attachés d’industrie de défense dans les préfectures de région contribuera à la prise en compte de ces différences. Dans la France du 21e siècle, l’ambition industrielle ne peut reproduire les schémas qui ont présidé aux Trente Glorieuses. Aujourd’hui, plusieurs écueils nous semblent devoir être relevés.
" Le courage de la nuance " (Jean Birnbaum, 2021)
L’acceptabilité de l’activité industrielle par la société civile est un premier écueil à affronter. Dans des espaces géographiques soumis à un fort flux démographique comme la région capitale, la pression foncière pour construire des logements peut être un véritable frein au développement ou à la création de sites industriels pourtant pourvoyeurs d’emplois. De même, la proximité d’activités industrielles peut être perçue comme des nuisances par les habitants (« une usine, oui, mais pas à côté de chez moi »). Cependant, rien n’est impossible comme le démontre la densification des sites ARESIA à Valenton (Val-de-Marne) et à Witry-lès-Reims (Marne), tous deux situés au cœur des communes. Ces sites appartiennent à l’histoire de leurs villes et sont bien connus des habitants qui y ont souvent eu des proches salariés. A l’écoute de leur population, les élus se montrent vigilants sur la préservation de leur patrimoine industriel. Ils accueillent plus que favorablement le développement des sites et les accompagnent avec énergie. Un responsable politique préfère gérer le développement de son économie locale que traiter des friches industrielles. Aux entreprises toutefois de faire preuve de responsabilité en intégrant les nouveaux investissements dans le tissu urbain pour limiter toute source de nuisance, bien sûr répondre aux attentes environnementales et contribuer ainsi à l’image de la collectivité.
Valenton, un site centenaire qui fait peau neuve, bien dans son territoire
" Il n’y a pas d’amour, il n’y a que des preuves d’amour " (Pierre Reverdy, 1920)
Deuxième écueil à prendre en considération, l’acceptabilité de la nature de l’activité industrielle. Contrairement à une idée reçue, nous témoignons que la BITD est très favorablement accueillie et soutenue par les territoires. Pour preuve, toutes les régions réfléchissent à développer des dispositifs de soutien à leur BITD locale, majoritairement composée de PME et ETI sous-traitantes. Cet engagement des collectivités se manifeste également par leur présence lors de grands événements comme EUROSATORY ou le salon du BOURGET. Les régions aiment la BITD et l’assument. On aimerait d’ailleurs qu’il en soit de même pour d’autres acteurs de l’économie française. Face à la mutation de grands secteurs industriels ayant structuré l’économie française, comme celui de l’automobile, les élus ont compris que l’industrie de défense offre des garanties de pérennité et d’excellence. En créant son site munitionnaire près de Valenciennes, ARESIA a constaté cette disposition favorable de toutes les institutions : de la région des Hauts-de-France à la métropole de Valenciennes en passant par les services de l’État, la CCI du Grand Hainaut, l’UIMM ou le cluster aéronautique ALTYTUD. Là où un regard « parisien » pourrait avoir quelques réticences sous la pression médiatisée de quelques bruyants activistes, les responsables politiques locaux n’ont aucun état d’âme et soutiennent pleinement l’implantation et le développement de sites industriels rattachés à la BITD. Ceci n’exonère pas les dirigeants des entreprises de se montrer pédagogues et d’expliquer leur activité pour éviter la rumeur déstabilisatrice que certains ne manqueraient pas de diffuser auprès de la population. Il ne s’agit ni d’organiser des portes-ouvertes, ni de se recroqueviller pour espérer être invisible. Il faut s’assumer en tant qu’acteur économique du territoire. A Bourges, à Cherbourg, à Bordeaux, personne ne souhaite le départ des grands groupes de la BITD. Il en va de même partout en France.
À Witry-lès-Reims, un site en augmentation de cadence
" De l’argent, de l’argent, et encore de l’argent… " (Maréchal de Trivulde à Louis XII, 1498)
La réindustrialisation est également une question de finances. Troisième écueil. C’est assurément le plus ardu. Non que l’argent soit rare. Il existe au travers d’une multitude de dispositifs définis par les assemblées territoriales et mis en œuvre par leurs services. Cela reste cependant un véritable jeu de piste pour les dirigeants d’entreprises. Difficile de s’y retrouver dans la jungle des fonds, enveloppes, dispositifs et autres programmes. Les élus en ont pris conscience et amorcent de véritables actions de simplification par la mise en place de guichet unique et la DGA y contribue efficacement. Le dispositif « Territoire d’industrie » en est une des concrétisations pertinentes. La quasi-totalité des (nombreux) sites industriels d’ARESIA sont situés dans des bassins reconnus « territoires d’industrie ». Tous ne sont pas au même niveau de maturité. Ceux mis en place en 2018 sont pleinement opérationnels. Ceux nouvellement désignés ont une phase préparatoire incontournable de plusieurs mois avant de pouvoir agir. Le choix de la collectivité pilote se révèle décisif pour le dynamisme et l’ambition portés.
Une certitude cependant : pouvoir dialoguer avec l’ensemble des décideurs publics en un seul lieu est un gain de temps inestimable. ARESIA a ainsi ouvert son site de Valenton au comité de pilotage « territoire d’industrie » du Grand-Orly Seine Bièvre. Jamais auparavant, autant d’administrations n’avaient été réunies autour d’une table à proximité de nos ateliers. Le résultat ne se fit pas attendre. Chacun apprenant de l’autre, de ses contraintes et de ses projets, les dossiers avancent plus vite.
" Il n’y est de richesse que d’Hommes " (Jean Bodin, 1576)
La réindustrialisation, ce sont aussi des femmes et des hommes, les ressources humaines : quatrième écueil. C’est devenu une banalité discursive de souligner les difficultés de l’industrie pour recruter. La rareté de la ressource humaine rend vain tout projet développé sur des territoires sans tradition industrielle, sans centre de formation aux métiers de l’industrie, sans établissement scolaire dispensant des enseignements adaptés aux besoins. En s’installant dans le Hainaut, ARESIA a avant tout choisi un bassin d’emploi reconnu et qualifié où l’on sait forger, usiner, souder et où l’enseignement professionnel et technique a une place reconnue. Les chefs d’entreprise doivent apporter leur contribution aux établissements scolaires pour promouvoir les métiers auprès de leurs élèves et de leurs parents. La réindustrialisation passe par une reconquête des esprits et des formations. ARESIA compte de nombreux alternants, apprentis et stagiaires recrutés dans l’environnement géographique immédiat de ses sites, pour se former au sein des ateliers et services supports. Les entreprises ne doivent pas attendre les bras croisés que le système de formation lui fournisse de la main d’œuvre qualifiée. Elles doivent y prendre une part active. ARESIA est présente autant à Baccarat dans un forum emploi qu’au cercle national des armées au cœur de Paris pour promouvoir les métiers de la défense.
Maîtrisant les écueils de la réindustrialisation, il convient de naviguer juste. Cette navigation est affaire d’équipage : le chef d’entreprise sur qui repose la responsabilité économique et financière du projet, en lien plus ou moins étroit avec la DGA ; les responsables politiques, en charge de l’intérêt général et de la bonne insertion du projet dans la collectivité ; les futurs collaborateurs, acteurs de la réussite ; la société civile, témoin vigilant. De la solidité et de la solidarité de cet équipage résultera la réussite du projet de réindustrialisation. Une histoire d’hommes et de femmes en définitive.
Bruno a eu un parcours très aéro, au CEV, puis au SPAé, notamment DP M.2000, puis dans l’armée de l’air (SC Plans Programmes) et a enfin été directeur adjoint de la DDI. Il a quitté le ministère fin 2011 pour rejoindre une PME équipementier aéronautique, RAFAUT, devenue ARESIA en 2022.
Thierry a été chef-adjoint de cabinet au ministère de la jeunesse et des sports puis collaborateur parlementaire de François Cornut-Gentille à l’Assemblée Nationale avant de rejoindre ARESIA en 2022. Lauréat de Sciences-Po Paris, il est auditeur de la 45e session nationale du CHEAr et de la 172e session régionale de
l’IHEDN.
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