L'AVIATION LEGERE, C'ETAIT BEAUCOUP MIEUX AVANT
LA DGAC A-T-ELLE ENCORE LES MOYENS?
L’Europe aux commandes, la DGAC a-t-elle encore les moyens ? L'aviation légère semble avoir été oubliée, et les bénévoles qui s'y investissent pèsent peu devant les institutions. Impossible pourtant de baisser les bras devant l'ambition des jeunes pilotes et les valeurs résolument modernes de l'aviation.
L’Européenne de la Sécurité Aérienne (EASA) créée en 2002 a mis en place une réglementation complète, et l’objectif d’unicité technique a été atteint ainsi que l’objectif d’unicité d’application.
Une seule réglementation, un seul certificateur : l’objectif principal des grands constructeurs était atteint.
Comme le soulignait le magazine des IA sur l’Europe « Le reste de la mise en œuvre est à la charge des Etats membres et de leur autorité d’aviation civile comme la Direction Générale de l’Aviation Civile (DGAC) en France. Quand c’est le cas l’Agence a pour mission de vérifier la bonne application des règlements. C’est ce qui est appelé la Standardisation. Elle consiste à inspecter le travail des autorités nationales. La Standardisation a, petit à petit, harmonisé les pratiques à travers l’Europe. »
L’aviation légère oubliée
Au début de la démarche consacrée à l’aviation légère, l’EASA a eu tendance à appliquer le même processus que celui de l’aviation commerciale avec une différence notable : parmi les acteurs concernés, il n’y avait plus l’équivalent des représentants de l’industrie aéronautique avec leurs compétences et leurs intérêts commerciaux impliquant d’aboutir le plus rapidement possible.
Les représentants de certains Etats ont alors eu tendance à vouloir « reprendre la main », enclins à augmenter la « sévérité » des règles de l’EASA. Dans des domaines qu’elles connaissaient moins, Les équipes DGAC sont apparues prudentes, en reportant les problèmes sur l’EASA elle-même. Nos représentants étaient peu enclins à adopter les mécanismes anglo-saxons des « Acceptable Mean of Compliance » (AMC consistant à faire avaliser bon nombre de pratiques antérieures.
Ainsi tout au moins au début, une aviation légère non défendue et quasiment oubliée, alors que la France, à elle seule, avec ses 42.000 licenciés, représente 50 % des pilotes privés de l’ensemble de l’Europe.
Des bénévoles face à l’EASA
L’aviation légère a sans doute été considérée comme quantité négligeable par les autorités françaises dans la mesure où son intérêt économique paraissait dérisoire. Ainsi le terrain laissé libre a été occupé en grande partie par les représentants des pays anglo-saxons. Ils ont travaillé sur la réglementation dans une approche ne prenant pas en compte la spécificité française essentielle suivante : la très grande majorité de nos associations est fondée sur le bénévolat de ses membres alors que chez les anglo-saxons les aéroclubs sont plutôt de petites sociétés commerciales. Nos associations se sont retrouvées confrontées à de premières règlementations totalement inadaptées à nos structures légères. Par manque de dialogue DGAC/EASA, la DGAC s’est révélée un relais sans valeur ajoutée ce qui n’a pas favorisé la recherche d’une voie allant vers la simplification.
Il a fallu une réaction des associations, les premières années de la décennie 2010, avec le concours de la Fédération Française Aéronautique (FAA) et la mise en place dans les instances de l’EASA de représentants français motivés et particulièrement au courant du fonctionnement et des particularités de nos associations pour qu’enfin les choses évoluent dans un sens plus constructif.
Par exemple Il a fallu attendre la fin 2018 pour que soit créée une nouvelle catégorie d’organismes de formation, qui ne préparent que des licences non commerciales. Ces organismes de formation relèvent du régime déclaratif et prennent le nom de « Declared Training Organisation (DTO) ». Avec de nombreuses améliorations significatives par rapport au règlement relatif aux organismes de formation agréés, « Approved Training Organisation » (ATO), le règlement correspondant marque une vraie avancée vers une formation aux licences privées, plus simple, plus légère et mieux adaptée.
Autre progrès, la conception et la production d’aéronefs d’aviation légère ne sont plus soumises au même processus de certification que celui applicable aux gros avions commerciaux. La certification basée sur des exigences fonctionnelles permet de s’adapter à des solutions innovantes, la certification de l’avion électrique le démontre.
Ainsi l’EASA s’est engagée à proposer un nouveau cadre réglementaire qui couvre de manière proportionnée la nature, les risques et les besoins des usagers d’aéronefs à but sportif et récréatif, tout en assurant des niveaux de sécurité appropriés. L’Agence envisage de retenir des standards industriels (plutôt que des exigences réglementaires) comme base du processus de certification des aéronefs. Ce changement va permettre de prendre en compte l’expérience des industriels et d’introduire de nouvelles technologies. En combinant judicieusement implication des autorités et nouvel état d’esprit, il devrait être possible de recueillir le soutien de l’ensemble des Etats membres.
Les améliorations en cours au sein de l’EASA dans la façon d’aborder les questions qui touchent à l’aviation légère sont encourageantes. Nous le devons à quelques fortes personnalités compétentes, patientes et dévouées opportunément placées dans le processus décisionnel de l’EASA.
Quelle aide de nos tutelles ? Trop de normes tuent la norme
Mais qu’en est-il pour nos administrations de tutelles et en premier lieu la DGAC ? Confrontés à de nouveaux sujets réglementaires et responsables de leur stricte observance, nos aéroclubs peuvent-ils se satisfaire de leurs interventions et de leur support ? Comme le remarquait justement un passionné d’aéronautique, l’abus réglementaire s’avère contre-productif :
« Lorsqu’on norme trop, on perd de la compétence technique et les « mécaniciens » arrêtent de réfléchir et s’intéressent davantage à la conformité de leur décision qu’à son bien-fondé technique. Cette déresponsabilisation est lourde de conséquences. Pour l’institution, parce qu’elle perd ses compétences. Pour le personnel aussi qui perd son autonomie et parfois sa fierté. En outre la qualité d’un texte étant rarement proportionnel à sa taille, les textes trop lourds poussent certains « mécaniciens » à déroger, à poser des actes non-conformes pour garantir le succès de la mission. Je suis donc favorable à des normes moins touffues mais strictement appliquées. Chacun prend alors ses responsabilités et pas celles des autres. »
Humain plus qu’automatique
Le fond de ce texte, le « mécanicien » étant pris dans un sens générique, me paraît adapté à ce que nous vivons présentement avec la DGAC. Et c’est dans cette « atmosphère » que nous essayons de faire perdurer l’image un peu surannée de nos activités. Au moment où le « Monde médiatique » nous dit qu’il n’y aura plus besoin de pilotes dans un monde sans voyages, et qu’il inutile de rêver de voler, car « ce n’est pas bon pour la planète », nous continuons à penser, vivre et agir comme si nous avions un avenir.
Est-ce bien raisonnable ?
L’avenir le dira. Signe de nos relations difficiles avec la DGAC, le Groupement des Usagers de l’Aérodrome d’Etampes (GUAE) vient d’écrire son désarroi au Directeur général de l’Aviation Civile devant « la dégradation des conditions d’exploitation de la plateforme d’Etampes au cours des dernières années. (…) la longue tradition de ce site dédié à l’aviation risque de s’étioler et de se perdre. Le service du contrôle aérien n’est plus, depuis longtemps, assuré sept jours sur sept (…)
En ce début 2021, la tour de contrôle d’Etampes ne dispose que d’un contrôleur et du chef local de la circulation aérienne sur un effectif théorique de sept agents. L’insuffisance de contrôleurs entraine automatiquement un nombre de journées en auto-information en constante augmentation et provoque, de ce fait, des difficultés croissantes d’exploitation pour tous les usagers. »
Perspectives d’avenir pour l’aviation légère
Il faut reconstruire notre légitimité dans la réflexion et non pas dans l’émotion. Bien que l’on puisse s’attendre à une forte demande de pilotes d’ici à 3, 4 ans, beaucoup de départs à la retraite étant prévus dans cette période, le lien avec les professionnels risque de devenir moins fort. De ce fait il faut renforcer notre place « incontestable » dans l’environnement socio-politique : nous avons une activité sportive et de loisir, nous sommes les « cultivateurs » d’espace de biodiversité sur nos terrains, nous sommes capables d’encadrer des jeunes en partageant nos activités et en promouvant auprès d’eux les carrières aéronautiques.
Au croisement des mondes sportifs, technologiques humanistes et artistiques, l’aviation est au cœur des valeurs de demain et non pas de celles d’hier. Il faut juste les traduire en langage moderne. Nous aurons un avenir si nous y croyons d’abord nous-mêmes. Et nous bâtirons ainsi le « Monde d’après » que nous ne nous laisserons pas imposer.
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