LE PÊCHEUR BALBUZARD, LA GRENOUILLE ET TESLA…
Son nom anglais est l’Osprey. Le Balbuzard pêcheur est un piscivore car les poissons représentent 99 % de son régime alimentaire. Il repère ses proies lors de vols au-dessus de grands étangs ou de lacs, et souvent plane avant de plonger, d'une hauteur de 10 à 50 m, les pattes en avant pour capturer un poisson. En Bourgogne, on appelle le balbuzard le Craupêcherot. Le nom fait référence à Pandion fils de Cécrops, roi mythique d'Athènes et grand-père de Thésée, qui a été transformé en aigle.
Pour les V suivis d’un nombre, il y a eu les armes allemandes V1 à V5, il y a les moteurs V6, V8, V20. Quant aux avions, je n’ai retrouvé que le biplane Fokker D. VII de 1917 ; ces diverses Versions de prototypes furent les V21, 22, 24, 31, 34, 35, 36 et 38. Il y eu bien aussi le V19 Torrent Starfi ghter mais seulement dans la guerre des étoiles… Bref, il faudra qu’un expert aéronautique m’explique les différents V qui ont pu précéder chez Bell Boeing le V22 Osprey… Cet hélicoptère/avion fût baptisé de ce nom en 1985. La compagnie Bell Helicopter avait accumulé trente ans de recherches dans le domaine des avions à rotors basculants et fait voler depuis 1977 un avion expérimental désigné XV15 qui devint le V22 0sprey. Mis en service en 2005, il est construit à près de 500 exemplaires pour les armées US, Britanniques, israéliennes et japonaises.
C’est le top des hélicoptères de transport. Comparons-le avec Le CH-46 Sea Night bi-rotor qui n'est plus utilisé aujourd'hui que chez les Marines qui l'appellent la grenouille à cause de sa position inclinée qui rappelle la posture d'une grenouille. La longévité exceptionnelle lui a d'ailleurs valu le surnom de « frog forever » (la grenouille pour toujours).
Le V22 Osprey a une masse de près de 25 tonnes, plus du double du CH46, une vitesse double (566 km/h), une distance franchissable quadruple (1 600 km), une capacité d’emport plus que doublée, une altitude maximale de vol presque double (8 000 m). Notre NH 90 ne fait guère mieux que le CH46 en performances comparées avec le V22 Osprey.
Vaut-il donc mieux avoir un V22 Osprey à 72 M€ que 3 NH90 à 24 M€ pièce ? La question reste ouverte… Au vu des performances extraordinaires du V22, cela peut en valoir la peine ! Le V22 Osprey, c’est en quelque sorte un « OVNE » (objet volant non égalé) et nous devrions certes en acheter quelques-uns ! Il a été qualifié sur le PACDG et sur les BPC mais je n’ai trouvé aucune photo des essais de manutention et manœuvres dans les hangars de nos fleurons de la marine. Ses ailes de géant l’empêchent de marcher !
Vu les trésors d’ingéniosité déployés pour replier ses pâles et faire basculer de 90 degrés sa voilure, cela ne devrait pas poser de problème sur le PA CDG dont la hauteur de hangar et les dimensions des ascenseurs sont largement suffisantes. Mais je crois bien qu’il ne peut actuellement être mis dans le hangar des BPC compte tenu de son poids (alors qu’il le serait sur les porte-hélicoptères japonais). Une modification à envisager ?
Le V22 Osprey est devenu un outil d’intervention des plus performants en OPEX par les USA (Irak, Afghanistan, Lybie, Yemen…). C’est aussi un appareil qui fit rêver et qui apparaît dans d’excellents films comme Transformers, Terminator Renaissance, Battle Los Angeles, Resident Evil ! Bien qu’il ait connu de nombreux accidents, le pêcheur balbuzard reste un des aéronefs qui fait rêver petits et grands.
Le V22 a mis 30 ans à se concrétiser, mais la suite est annoncée : le projet de la DARPA VTOL X-plane en est aux essais en vol : au lieu de 2 hélices, ce nouvel avion (si on veut…) n'a pas moins de 20 rotors pour mieux décoller, et ses ailes basculent pour le vol horizontal.
L'innovation est repartie, toujours pour la même capacité majeure : se dispenser de piste. L'hélicoptère est parfait pour cela, mais ne vole pas très vite. Le V22 a une finesse à peine meilleure que celle d'un fer à repasser (si, si, il y a des fers étonnants ) mais reste encore un peu lent: c'est en allant chercher des idées, au lieu de les définir soimême, qu'on progresse le mieux. Saurons-nous bien équilibrer l'innovation de maîtrise d'ouvrage et celle qui est apportée par des sources insoupçonnées? Dans un contexte où très souvent chacun croit savoir ce qu'il veut, c'est un beau défi !
L’histoire du V22 nous montre comment une innovation révolutionnaire mit près de 30 ans à devenir un engin fiable. C’est une leçon d’humilité et de constance dans le monde de l’innovation qui semble aujourd’hui pris de frénésie. Je ne peux terminer cette ode à une machine à décollage et atterrissage vertical sans rappeler les centaines brevets déposés par Nikola Tesla, le génial inventeur, entre autres, du courant alternatif. En 1928, Tesla dépose en effet son dernier brevet, un biplan à décollage et atterrissage verticaux. Il émit aussi l’idée d’une soucoupe volante, bien avant les légendaires prototypes allemands de la seconde guerre mondiale : http:// threatconspiracy.canalblog.com/ archives/2015/12/16/33079067. html
Denis Plane, IGA | |
Xavier Lebacq, IGA, consultant | |
Denis Plane, a commencé sa carrière sous le signe du naval à Toulon puis au STCAN. Passant par les missiles, le service technique des systèmes navals puis le service technique des technologies communes, il dirige la direction des programmes de la DGA jusqu’en 2003. Il est ensuite nommé contrôleur général des armées en mission extraordinaire jusqu’en 2009. Il est membre de la commission de déontologie. |
Xavier Lebacq a effectué une grande partie de sa carrière à la DGA dans une large palette de métiers, dont celui de directeur de programme du PA CDG. Après avoir supervisé les études du second porte-avions, il s’attela au démantèlement du Clémenceau puis de tous les matériels militaires avant de quitter l’administration en 2010. |
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