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23 mars 2023

PLONGER HORS DE SA ZONE DE CONFORT
INTERVIEW D’UN INFORMATICIEN PAR HASARD

Bruno Marescaux (X96, SupAéro 2001) a commencé sa carrière au CELAr. Après avoir été Chef de cabinet du directeur des essais de la DGA, puis conseiller du DGA, il a été chargé de mission auprès du président de la Commission du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale en 2007, puis conseiller pour les affaires internationales et le renseignement au SGDSN. Il devient directeur du Centre opérationnel de la sécurité des systèmes d’information à l’ANSSI en 2016. Revenu à la DGA en 2018, il devient directeur adjoint de l’unité de management mixte DGA-DIRISI « Socle numérique ». Depuis 2021, Bruno Marescaux occupe les fonctions de chargé de mission cyberdéfense auprès du DGA.


La CAIA : Lorsque tu es entré dans l’armement, quelles étaient tes motivations ?

Bruno Marescaux : Au moment de faire des choix en fin de scolarité à l’X, je me souviens avoir sérieusement étudié deux options : l’exercice du métier des armes dans l’armée de terre, attiré que j’étais par la dimension humaine et opérationnelle de l’exercice du commandement. Ou la voie du corps de l’armement, que je percevais alors comme une façon de concilier, tout en étant militaire, mon intérêt pour le domaine aéronautique et la possibilité d’exercer des responsabilités très diverses, tant au service de nos forces au sein du ministère des armées que plus largement dans le domaine de la défense et de la sécurité nationale. Après une bonne vingtaine d’années d’activité dans le corps de l’armement, dont une moitié à l’extérieur du ministère des armées, je mesure à quel point choisir cette deuxième option a été pour moi source d’épanouissement.

Bruno, tu es aujourd’hui responsable du domaine cyber pour la DGA. La cyber est souvent une affaire de geeks. Est-ce ton cas ?

BM : Non, de fait, je suis un peu tombé dans le domaine cyber par hasard ! J’ai en effet commencé ma carrière à la DGA en 2001 dans le domaine des missiles, avant d’occuper des fonctions en cabinet, d’abord à la DGA jusqu’en 2007, puis auprès du secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale jusqu’en 2013, avec une année charnière consacrée à la rédaction du livre blanc sur la défense et la sécurité nationale en 2007/2008. Cette première partie de carrière extrêmement enrichissante m’a notamment permis d’acquérir une bonne vision de l’organisation et du fonctionnement de l’État, jusqu’au plus haut niveau. Et de prendre conscience de l’ampleur des défis à relever dans le domaine cyber. Ce n’est donc qu’en 2013 que je m’oriente vers ce domaine en rejoignant l’agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI). C’est pour moi un plongeon hors de ma zone de confort, au cœur du réacteur, au sein du centre opérationnel de l’agence, d’abord comme numéro deux puis comme chef du centre. J’ai alors découvert un domaine absolument passionnant, porté par des agents extraordinaires. Ce sont d’ailleurs eux qui m’ont formé sur le plan technique. Au cours de cette période, il me revient d’assurer la conduite de plusieurs opérations de cyberdéfense majeures, dont celles contre les cyberattaques d’envergure mondiale perpétrées à des fins de destruction et de sabotage au printemps 2017. Je pilote également l’opération de cybersécurisation des élections présidentielle et législatives de 2017.

Quels ont été tes ressorts pour entrer sur ce domaine et celui de l’IT ?

BM : Le domaine cyber, et plus généralement celui du numérique, sont des domaines en plein essor, dans lesquels rien n’est écrit par avance et beaucoup reste à inventer. Les enjeux techniques sont évidemment très forts mais les enjeux managériaux ne le sont pas moins. Bâtir une capacité nationale de cyberdéfense, ou encore transformer l’IT du ministère des armées, requiert certes une bonne compréhension des enjeux techniques mais aussi de solides compétences managériales, que je crois avoir pu mettre avec succès tant au service de mes chefs que de mes collaborateurs. Cela requiert également de pouvoir penser « hors de la boîte », « faire autrement » afin de mettre en œuvre des solutions à des problèmes qui n’existaient parfois pas quelques mois plus tôt, quitte à devoir casser les codes pour y parvenir.

Comment définirais-tu aujourd’hui (et pour demain) ton profil d’ingénieur de l’armement ? Directeur de programme ? Manager ? Expert ?

BM : Depuis dix ans, je prends beaucoup de plaisir à manager des femmes et des hommes impliqués dans des projets de construction ou de transformation, dans lesquels l’imagination et l’audace jouent un rôle déterminant. Il y a dans les domaines cyber et numérique un vrai besoin de managers capables de faire le lien entre les réalités techniques, les ambitions politiques et les exigences opérationnelles dans un environnement très volatil et au sein d’un écosystème de partenaires très nombreux. Il y a des opportunités pour les experts techniques qui accepteraient de faire le deuil de la technique pour devenir manager. Il y en a de plus grandes encore pour les ingénieurs de l’armement qui, disposant d’une double compétence managériale et technique, décideraient de partir à l’aventure pour écrire les prochaines pages de l’histoire du cyber et du numérique en France.

Auteurs

Rédacteur en chef du magazine des ingénieurs de l'Armement.
Coach professionnel certifié et accrédité "master practitioner" par l'EMCC.
Fondateur de Blue Work Partners SAS qui propose :<br>
- Formation au leadership
- Coaching de dirigeants
- Accompagnement d'équipes projets
X84, ENSTA, coach certifié IFOD,
Auteur du guide de survie du chef de projet (Dunod 2017).
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