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03 juin 2024

MONTER EN PUISSANCE, UN DÉFI POUR L’INDUSTRIE FRANÇAISE, DE LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE À L’ARMEMENT

Publié par Roland Lescure, Ministre de l'industrie et de l'énergie | N° 132 - MONTÉES EN PUISSANCE

« Montées en puissance », voilà un beau titre pour ce nouveau numéro du magazine des ingénieurs de l’armement, mais aussi un bel objectif pour l’industrie française dans un contexte de rapide transformation de l’économie mondiale. 


La décennie 2020, ouverte par le Covid-19 et l’agression russe en Ukraine, s’annonce en effet comme une décennie de crises et de transitions, parmi lesquelles deux se détachent : le défi de la souveraineté économique, porté par l’accroissement des tensions géopolitiques et de montée des enjeux de défense, et le défi de la transformation écologique, structuré par l’objectif européen de réduire de 55% les émissions de CO2. A ces deux défis, la montée en puissance de notre industrie est la réponse.

En effet, il n’y a pas de souveraineté sans industrie. Comme l’a montré la crise du Covid-19 et comme le montre tous les jours le conflit ukrainien, être capable de produire, sur notre territoire et en grande série est un atout indispensable pour répondre souverainement à toute crise, sanitaire ou militaire. Une telle capacité nécessite un tissu industriel capable de répondre à toute demande, qu’elle provienne de nos armées ou de nos hôpitaux, qu’il s’agisse des grands groupes ou des PME. 

C’est une des chances de la France que de disposer d’un tel écosystème dans son industrie de défense. Elle y est forte d’une compétence reconnue au meilleur niveau mondial. Pour la première fois dans l’histoire, notre pays s’est en effet hissé au deuxième rang des exportateurs d’armes pour l’année 2023. Ce succès est bien sûr celui de nos entreprises et de nos savoir-faire, mais c’est aussi celui de la DGA, qui les accompagne et qui a su structurer des chaînes de valeur françaises sur des composants essentiels en mobilisant pleinement le levier de la commande publique.

Ce succès est pour moi un exemple à suivre pour assurer la souveraineté de toutes nos chaînes de valeur stratégiques, et ce n’est pas pour rien que c’est un ancien de la DGA, l’IGA Benjamin Gallezot, qui est chargé depuis plus d’un an de piloter la stratégie française d’approvisionnements et métaux critiques, ce « pétrole de demain », clé de la transition énergétique. 

Ce succès mérité de notre industrie de défense ne saurait bien sûr masquer les défis, nombreux, de la montée en puissance. Le conflit ukrainien dure depuis plus de deux ans, et, comme l’a rappelé encore récemment le président de la République, la mobilisation de nos usines n’est pas encore achevée. Si Nexter produisait ainsi 1 000 obus par mois avant février 2022, et qu’il en produit aujourd’hui 3 000, l’Ukraine en tire 5 000 par jour. Le défi de la souveraineté est donc aussi un défi du passage à l’échelle. Elle passe par la pleine mobilisation des capacités de production existantes, y compris civiles, mais aussi par la réindustrialisation que j’appelle de mes vœux. 

Le même enjeu de passage à l’échelle se pose pour l’autre grand défi de cette décennie : la transition écologique. De même qu’il n’y a pas de politique de défense sans industrie de défense, il ne peut y avoir de décarbonation sans industrie de la décarbonation. La transition écologique sera en effet avant tout une grande affaire industrielle, celle du remplacement, en moins de vingt ans, de l’ensemble des technologies carbonées qui forment le substrat technologique de notre société par des technologies bas carbone. Véhicules électriques, batteries, panneaux solaires, pompes à chaleur, électrolyseurs : autant d’équipements qu’il va nous falloir produire à très grande échelle en France d’ici 2030, alors même que certaines de ces technologies sortent à peine du laboratoire. Notre souveraineté énergétique en dépend. 

Ce défi de l’industrialisation des technologies vertes est au cœur de ma feuille de route comme ministre chargé de l’industrie et de l’énergie. Et là non plus, ce n’est peut-être pas pour rien que le directeur général des entreprises, qui rédige aujourd’hui une stratégie industrie verte pour notre pays, est lui aussi un ingénieur de l’armement : l’IGA Thomas Courbe, qui œuvre depuis 2018 à la réindustrialisation de notre pays à ce poste stratégique.

L’industrie de défense sera là aussi un exemple à suivre de près : la manière dont elle est en train de relever le défi du passage à l’échelle sera un exemple pour accélérer la montée en charge de nos lignes de production vertes : reconversion des sites existants, mobilisation de toutes les compétences, réindustrialisation : ce sont les mêmes mécaniques qui nous permettront le succès.

La compétence, justement, est au cœur du succès industriel. C’est pourquoi je voudrais terminer en rendant hommage à ce grand corps de l’Etat qui, héritier d’une tradition pluriséculaire qui remonte à Vauban, met chaque jour ses capacités au service de la souveraineté industrielle de la France. Que ce soit dans leur mission historique, au service des forces armées, mais aussi, j’espère vous en avoir convaincu, à Bercy au service de la réindustrialisation verte, les ingénieurs de l’armement sont un actif clé pour le renouveau industriel de notre pays. Je suis heureux de pouvoir compter sur eux.

 

Auteur

Roland Lescure, Ministre de l'industrie et de l'énergie

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