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01 octobre 2018

PLONGÉES DANS LE NUMÉRIQUE

Claude Shannon était-il vraiment conscient de la portée de ses travaux sur la conversion analogique – numérique au moment où il a énoncé son célèbre théorème ? Il avait probablement conscience du potentiel du traitement des données numériques car il faisait partie des organisateurs du célèbre congrès fondateur de l’intelligence artificielle avec John Mc Carthy, Marvin Minsky et Nathaniel Rochester à Darmouth durant l’été 1956. Avait-il imaginé ce que donneraient ces données numériques combinées avec la mise en place de larges réseaux publics et privés de télécommunication permettant leur échange ?

Le numérique est devenu protéiforme et il serait prétentieux d’être exhaustif dans sa présentation. Néanmoins, ses fondements reposent sur les échanges de données, sur leur traitement, mais également sur la standardisation qui facilite les échanges et la réutilisation des traitements.

Le numérique est un mouvement qui avance partout dans les mondes civils et militaires, pour amener toujours plus de fluidité et plus de services dans les échanges au sein des organisations mais également entre organisations. Les processus de conception et de développement ont été profondément modifiés par l’utilisation d’outils numériques, mais également par de nouveaux modèles d’organisation plus coopératifs et moins hiérarchisés. En effet, cela n’aurait pas de sens de reproduire à l’identique en numérique un processus dont certaines étapes vont être profondément modifiées, ne serait qu’avec la diffusion simultanée d’informations à plusieurs acteurs et la mise en place de traitements automatisés pour les tâches fastidieuses.

La Havard Business Review considérait en septembre 2017 que la transformation numérique comporte 3 axes majeurs. Le premier concerne la relation avec le client qui est mis au centre des développements que ce soit pour l’exploitation des données ou la co-conception de nouveaux produits et services. Le deuxième s’appuie sur des collaborateurs plus responsabilisés avec un management plus collaboratif et des compétences numériques mieux partagées par tous au sein de l’organisation. Enfin, les processus internes sont optimisés et plus agiles grâce à la simplification des étapes de développement et production, à la fluidification des échanges d’informations, à des organisations plus simples et des projets plus courts, plus incrémentaux.

Dans certains secteurs, le numérique a même amené l’émergence de nouveaux modèles économiques avec des plates-formes de mises en relation qui ont profondément transformé le commerce, les transports, le tourisme... autant sur la partie échange de données, mise en relation entre fournisseurs et clients que sur la partie traitements (segmentation de la clientèle, marketing et publicité adapté à chaque segment…). La question se posera forcément dans des secteurs plus éloignés dans les années qui viennent.

Dans ce numéro spécial, nous avons essayé de trouver un équilibre entre les évolutions techniques et méthodologiques du domaine du numérique auxquelles les ingénieurs que vous êtes sont très attachés ( !) et le partage d’expérience sur les démarches de transformation, sur les projets et les réalisations dans les domaines civils et militaires.

Le numérique est aujourd’hui tiré par le secteur civil et modifie profondément le secteur concurrentiel. Il nous semblait indispensable de donner un éclairage sur son déploiement et les transformations en cours dans des secteurs variés (aéronautique, énergie, santé, entreprises de services numériques, défense…).

Difficile de parler de numérique sans évoquer les techniques et méthodes qui font évoluer les traitements, la manière de conduire les projets que ce soit les méthodes agiles, le DEV-OPS, les services dans le Cloud, les ressources en open source, la simulation, l’intelligence artificielle… mais également quelques problématiques transverses comme la cybersécurité ou les aspects réglementaires quelques mois après l’entrée en vigueur du RGPD en Europe et du Cloud Act par les Etats-Unis.

Les armées ne sont pas en reste dans la recherche de l’exploitation du numérique. Cela concerne évidemment les systèmes d’information opérationnels mais touche l’ensemble des systèmes d’armes et des platesformes qui sont de plus en plus numériques et interconnectés. Au sein du Ministère des Armées, cette dynamique de transformation est conduite avec un double mouvement de coordination d’ensemble des initiatives par la nouvelle Direction générale du numérique (DGNum) et de mise en valeur des initiatives provenant du terrain.

La France a probablement la particularité de disposer de grands techniciens du numérique (INRIA … pour la recherche, ATOS, Cap Gemini, SopraSteria … pour les entreprises de services numériques, Dassault Systèmes, leader mondial de la conception assistée par ordinateur…), et d’apparaître un peu en retrait dans la diffusion numérique dans l’ensemble des secteurs économiques par rapport aux grands pays industrialisés. Il y a pourtant des exemples frappant comme celui de L’Oréal, entreprise au cœur de métier éloigné du numérique, qui démontrait avec son immense stand lors du dernier salon VIVATECH de mai 2018 avoir pris le virage de la transformation numérique en s’entourant d’un écosystème de partenaires.

Profitons de notre état d’esprit d’ingénieur et de manager pour imaginer les applications et les implications du numérique dans nos produits, nos services et nos organisations…

Auteur

Actuellement directeur du Service de la Performance et de la Qualité Industrielles (assurance qualité et performance industrielle chez les maîtres d’œuvres industriels de défense) de la DGA (ex Service de la Qualité). Ce service d'environ 500 personnes comprend environ 400 experts, spécialistes, chefs de projet en assurance qualité.
Après une thèse en intelligence artificielle à l'ONERA et SupAero et plusieurs années comme expert et chef de projet en robotique sous-marine, j'ai rejoint le domaine des systèmes de systèmes d'abord terrestre où j'ai contribué au lancement du programme SCORPION, et à la conduite du programme SCCOA de commandement et de contrôle des opérations aériennes comme directeur de programme. Après des responsabilités importantes sur les marchés de défense en tant qu'adjoint au chef des marchés de la DGA, je me suis occupé de l'accélération des efforts du Ministère en intelligence artificielle avec la task force IA puis de la DGA sur sa transformation numérique jusqu'à fin 2021. Voir les 2 Voir les autres publications de l’auteur(trice)

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