AQUANAUTE : VIVRE LE SPATIAL EN PISCINE POUR SUSCITER DES VOCATIONS
Au moment où la conquête spatiale semble sur le point de trouver son second souffle, comment faire pour que ce défi technique, économique et humain continue de susciter de fortes vocations, et emporte avec lui des jeunes que rien ne prédestine à de tels projets ?
Si les passionnés du vol habité ne manquent pas dans ma génération, nombreuses sont les barrières à l’entrée pour oser s’approprier une passion aussi ambitieuse qu’exigeante que celle de la conquête spatiale. Peut-on bousculer les codes et permettre à ceux qui ne sont pas prédestinés à la mécanique céleste, l’analyse mission ou un séjour sur l’ISS, d’entrer dans ce rêve et de nous apporter leur regard ? Peut-on proposer une expérience qui ouvre à la passion des étoiles des jeunes d’origines différentes ?
Dans le cadre du projet d'ouverture sociale étudiante de l'ISAE-SUPAERO, OSE1, j’ai été contacté par Cécile Latournerie et Joël Daste, employés de la fondation, qui depuis quelques temps avaient monté un projet en partenariat avec un club de plongée sous-marine pour faire découvrir cette activité à des jeunes du collège Georges Sand. J’avais travaillé pour COMEX pendant un an sur l’entraînement des astronautes en milieu sous-marin, notamment comme plongeur d’essai, et ils m’ont proposé de monter un projet qui aborderait simultanément les thèmes de la plongée sous-marine et de la conquête spatiale, pour susciter des vocations chez les jeunes et leur faire dépasser certains préjugés.
Une sensation de gravité lunaire
L’objectif du projet Aquanaute : faire plonger en scaphandre autonome des collégiens issus de milieux défavorisés, en piscine, dans une configuration proche de celle des simulations de sorties extra-véhiculaires sur lesquelles je travaillais à COMEX. Le principe est d’utiliser la flottabilité du plongeur pour ajuster un niveau de gravité inférieur à celui qui est ressenti sur Terre. Nous avons cherché à retrouver une flottabilité négative environ égale au sixième du poids des enfants pour simuler l’exploration de la Lune. Par équipes de trois, sans palmes, avec un plombage adéquat aux chevilles pour assurer la station verticale, les jeunes ont donc pu réaliser dans le bassin des scénarios d’exploration d’une heure qu’ils avaient eux-mêmes rédigés dans la matinée. Au menu : cartographie du site, communications, assistance d’un autre aquanaute après une chute, prise d’échantillons planétaires avec une pince et des gants qui entravent les mouvements de préhension (ce qui est une vraie difficulté des scaphandres pressurisés).
Malgré un peu de lenteur au démarrage pour écrire les scénarios, l’enthousiasme a vite été au rendez-vous dans le bassin, même de la part des plus récalcitrants ! Tous ont pris du plaisir à se déplacer au fond de la piscine par ces petits bonds typiques de l’adaptation psychomotrice naturelle de l’homme aux conditions de gravité réduite. A la sortie de l’eau et après la remise des diplômes d’Aquanaute, nous avons été récompensés par beaucoup d’enthousiasme vis à vis des sensations rencontrées : l’immersion psychologique dans le scénario d’exploration est un pari réussi et les sourires sont accrochés, même si cette première expérience appelle comme toujours à beaucoup d’améliorations. De là à avoir suscité des vocations, il faudra de nombreuses années pour le savoir, mais pour ma part, j’espère fortement être contacté prochainement par un de ces jeunes chez qui l’idée aurait germé, et qui voudrait savoir comment entrer dans une école d’ingénieur !
Arnaud Prost, IA | |
Après avoir travaillé un an pour l’entreprise d’ingénierie sous-marine Comex sur l’entraînement des astronautes en milieu sous-marin pendant son année de césure, Arnaud Prost est entré dans le corps en 2016 et effectue un stage de recherche à Moscou. Il a rejoint Salon-de-Provence en septembre pour la formation de pilote militaire du CEV. |
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