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01 octobre 2017

ENTRETIEN : PARTAGER LA PASSION DU JUDO

Gabriel Aulard-Dorche, IA X2010 et Supaéro 2014, Gabriel Aulard-Dorche est en poste à DGA-IP après une affection temporaire dans l’industrie en tant qu’ingénieur en architecture des systèmes spatiaux chez Dassault Aviation. Ceinture noire 2ème dan de Judo.


Tu pratiques le judo à Balard et tu donnes bénévolement de ton temps pour l’enseigner. Comment en es-tu arrivé à pousser la porte du dojo de Balard ?
J’ai fait beaucoup de judo pendant ma scolarité. Mais après l’X, j’ai changé très fréquemment de lieu d’affectation et je ne restais pas suffisamment longtemps pour que cela vaille la peine de m’inscrire à un club. Lorsque j’ai retrouvé un peu de stabilité, j’ai cherché auprès du tout nouveau Club Défense Balard Arcueil s’il y avait une section judo. Grâce au dojo sur Balard et à l’appui du président de la ligue Ile de France de la Fédération des Clubs de Défense, un ICA persévérant, François Decourt, avait réussi à monter un club en récupérant quelques tapis d’occasion. Les conditions initiales étaient un peu rustiques : la surface de combat s’est agrandie petit à petit et les tatamis, encore non fixés au sol avaient tendance à s’écarter dangereusement. Malgré tout, nous nous sommes retrouvés à environ 5 pratiquants à organiser des entraînements communs plus que de véritables cours. Que ce soit la roublardise de l’expérimenté, la technique au sol du sambo ou le dynamisme du compétiteur, chacun apportait sa pierre à l’édifice sans qu’il y ait besoin de formaliser l’échange.

Les débuts ont donc été un peu difficiles ! Qu’est-ce qui t’a incité à continuer à pratiquer à Balard ? Pourquoi ne pas avoir choisi un club plus près de ton travail ?
D’un point de vue pratique, c’est vrai que cela aurait été plus facile : j’avais presque une demi-heure de trajet pour venir au dojo. Mais, j’ai apprécié l’ambiance décontractée et le bel esprit de partage du club. Ici l’objectif est de progresser ensemble et surtout de se faire plaisir en montant sur les tatamis. C’est quelque chose de suffisamment rare pour être conservé. J’ai donc décidé de continuer, d’autant plus que la saison semblait des plus prometteuses : le nombre d’inscrits était monté à 30 grâce à la communication active du responsable de la section, Nicolas Bescond. Cela nous a permis de nous retrouver lors des séances à une dizaine de judokas sur le tapis, un bon nombre compte tenu de la taille de la salle.

C’est donc en grande partie la qualité du lien avec tes camarades qui te motive. Que peux-tu nous dire sur leur profil et leur niveau de pratique ?
La section judo est une belle occasion de découvrir des profils très différents, la seule constante étant liée à la localisation du dojo dans l’enceinte militaire : il faut donc une autorisation pour y entrer. Nous regroupons des militaires de toutes les armées, de la DGA, des civils de la Défense et même des stagiaires civils de passage à l’EMA. Une fois sur le tapis nous sommes tous en kimono blanc et seule la couleur de la ceinture diffère ! Certains nous ont rejoints pour retrouver sur les tapis des sensations oubliées après 10 ou 20 ans d’arrêt. D’autres débutent complètement et veulent découvrir ce sport pour diverses raisons : mieux appréhender les chutes, enrichir leur panel de techniques pour d’autres arts martiaux, ou même essayer ce sport avant d’inscrire leur enfant dans un club. Enfin, nous regroupons aussi des judokas expérimentés qui profitent de la proximité du dojo pour pratiquer le judo entre midi et deux heures. Cependant, en étant plus nombreux, il a été nécessaire de structurer les séances en identifiant pour chacune d’entre elles un animateur responsable. Etant ceinture noire deuxième dan, je me suis proposé pour encadrer celles du mercredi midi.

Quel est le niveau ou la compétence pour être animateur ? Es-tu seul à animer les séances ?
Le club est rattaché à la Fédération des Clubs de la Défense qui n’impose pas de qualifications particulières pour ses animateurs bénévoles. Comme nous n’avons pas de professeur diplômé parmi nos rangs, nous avons décidé que seules les ceintures noires volontaires pourraient encadrer les séances. Cela garantit que les animateurs ont suffisamment d’expérience pour assurer une pratique du judo en toute sécurité. C’est d’ailleurs un point sur lequel je suis particulièrement attentif. Je veille à ce que l’intensité de l’entraînement et des combats soit adaptée au niveau des partenaires. Avec les 6 ceintures noires du club, cela nous permet d’organiser 3 séances par semaine, les lundi et mercredi midi ainsi que le jeudi à partir de 17h, tout en ayant suffisamment de redondance pour pallier les imprévus.

 

Avec tous ces niveaux différents, j’imagine que l’animation d’une séance demande un certain effort. Pourquoi avoir choisi de rester bénévole ?
La préparation des séances en amont demande effectivement un certain temps d’autant plus que je m’efforce toujours d’être le plus pédagogique possible. C’est nécessaire car certains peuvent avoir une appréhension de la chute ou des difficultés à agir au moment juste. Le judo recherchant le meilleur emploi de l’énergie, la seule force physique est loin d’être suffisante pour faire chuter son partenaire. Le décorticage pédagogique m’incite à remettre en question ma pratique en cherchant de multiples façons de présenter la même action. Mais, quel que soit le niveau de préparation de la séance, il faut toujours s’avoir s’adapter à l’imprévu. La gestion d’une séance est toujours un bel exercice de gestion de groupe. Malgré l’investissement que cela représente, je reste bénévole au sein du club. En effet, le judo est une discipline assez singulière parce qu’elle propose aux pratiquants un développement physique mais aussi moral. Bien que l’aspect sportif soit aujourd’hui le plus visible médiatiquement, il ne résume en aucun cas l’essence du judo : l’une des valeurs fondatrices est « Entraide et prospérité mutuelle ». Elle signifie que les progrès de chacun passent par les échanges avec autrui. Lors des séances, même lorsque la chute est rude, les pratiquants s’entraînent avec des partenaires et non des adversaires : chacun a ainsi beaucoup à apprendre de son contact avec l’autre. L’échange bidirectionnel entre les judokas est fondamental. Ayant baigné dans le judo assez jeune, je crois que j’ai été et je suis toujours inconsciemment orienté par ce principe. En f n de compte, la réussite et l’intérêt de la séance tiennent tout autant à l’animateur qu’aux pratiquants. C’est grâce à leur participation dynamique et à la bonne humeur qu’ils entretiennent au club que j’ai autant de plaisir à animer les séances du mercredi.

Le judo est donc un vecteur important de valeurs morales, que peux-tu dire à ceux qui voudraient en savoir plus ?
J’enjoins tous ceux qui le souhaitent à venir nous rejoindre au dojo. Du côté sportif, nous avons des kimonos de prêt pour ceux qui veulent s’essayer au judo. Pour ce qui est des valeurs et principes moraux du judo, la mise en pratique est du ressort de chacun, sur ou hors tatami. Enfin, la meilleure preuve de la qualité des échanges au club, c’est peut-être le fait que certains, ayant quitté Balard pour Toulouse, profitent toujours d’une réunion sur Paris pour enfiler le kimono avec nous le temps d’une séance !

Propos recueillis par Yves de Lassat de Pressigny, ICA.

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