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01 juin 2018

COMMERCY, UNE USINE SORTIE DES CHAMPS
ROAD TRIP DES JEUNES IA DANS LE GRAND EST

En janvier février dernier, nous nous sommes retrouvés en promotion – les IA 2016 – pour la traditionnelle FAMIA. Au programme : conférences, visites de sites industriels et militaires, qui nous ont permis de construire notre culture armement. Notre tour de France nous a conduits à passer quelques jours dans l’Est (voir encadré). L’occasion pour nous de visiter un site industriel particulièrement inspirant : l’usine de Safran Aéro Composite, à Commercy.


Mercredi 31 janvier. À bord de nos minivans nous suivons les indications du GPS qui nous amènent jusqu’à Commercy, en Lorraine. Non, les IA ne se dirigent pas vers la visite d’une usine de madeleines, la spécialité de cette petite ville de la Meuse, mais bien vers une nouvelle usine du groupe Safran. Inaugurée en 2013 dans le cadre d’une opération de réindustrialisation, impliquant volonté politique de l’ancien ministre de la défense et sénateur local Gérard Longuet et conviction de Safran, alors dirigé par Jean-Paul Herteman, que l’on saurait trouver en Lorraine le support, le soutien et la main d’œuvre dédiée et qualifiée nécessaires, l’usine est flambant neuve.

Une co-usine Safran-Albany poussée en plein champ

A notre surprise, nous sommes accueillis non pas par un mais par deux directeurs, Olivier Briffaux de Safran, et Thierry Schweitzer d’Albany : l’usine a en effet la particularité de regrouper sous son toit l’équipementier et son fournisseur, spécialiste des matériaux composites. On produit à Commercy les carters et les aubes du moteur Leap, destiné à l’aviation commerciale. L’histoire de l’usine de Commercy est fortement liée au succès de ce moteur, dont plus de 14 000 exemplaires ont déjà été commandés. Le Leap équipe les A320neo européens, les B737max américains et les C919 chinois. Le site de Commercy produit les pièces destinées principalement au marché européen. Deux sites similaires - un aux Etats-Unis et un au Mexique – sont également en service pour répondre à la forte demande mondiale.

Nous visitons l’usine en suivant le cycle de fabrication de produit, d’abord côté Albany puis côté Safran. La production a commencé en 2016 et le défi actuel de l’équipe de direction est la montée en cadence. Objectif affiché : passer de 20 aubes (un moteur Leap en compte 18) par jour en 2017 à 50 aubes par jour à l’horizon 2021.

L’usine est un exemple parlant de l’application du Lean : le flux du produit sur la chaîne industrielle est visible et compréhensible. Cela commence côté Albany, par les métiers où la fibre de carbone est tissée en 3D. La pièce est ensuite imprégnée de résine et cuite au sein de moule spécialement désignés, selon le procédé Resin Transfer Molding. Elle est ensuite ébavurée puis rejoint la partie Safran de l’usine. Le pied, le bord d’attaque et le bord de fuite sont alors usinés avant que l’aube subisse de rigoureux contrôles qualité (contrôle visuel, géométrique, par radiographie). Un renfort en titane du bord d’attaque est ensuite collé avant peinture et vérification finale.

La montée en cadence de l’usine repose sur deux leviers. Il faut tout d’abord consolider le process de fabrication, en constante évolution grâce aux nombreuses avancées technologiques. Mettre les outils à jour, notamment les métiers utilisés pour tisser la fibre de carbone. Les métiers actuels sont en effet progressivement remplacés par des métiers plus automatisés, qui demandent moins d’actions de l’opérateur et ont donc un meilleur rendement. Le deuxième levier est la stabilisation du process qualité. Comment assurer un contrôle qualité performant et efficace, en tout point de la chaîne, sur des produits intégrant des technologies de pointe et qui doivent respecter les standards aéronautiques ? Un exemple est celui du contrôle 3D. Pour vérifier que les aubes ont pris la forme adéquate, des points de mesures sont pris sur les pièces. Combien de points de mesure sont nécessaires pour s’assurer de la qualité de la pièce ? L’enjeu est ici de trouver le compromis entre un nombre de points trop faible ne faisant pas ressortir les pièces défectueuses et un nombre de points trop élevé augmentant le temps de contrôle inutilement.

La promo IA 2016 (X2013 et titres) en visite au 1er régiment d’hélicoptères de combat de l’ALAT à Phalsbourg : hélicos sous les hangars et camions rouges sur le tarmac

A tous les niveaux de la chaine nous rencontrons les opérateurs aux différents postes techniques : tissage de la fibre, préparation avant imprégnation, contrôle visuel. L’amélioration des cadences passe aussi par l’amélioration de leurs conditions de travail. Par exemple, après tissage de la fibre de carbone, il reste à découper de nombreux brins pour ajuster le bloc de fibre de carbone au moule de l’aube. Cette opération est aujourd’hui effectuée à la main et il faut environ 1h pour préparer une aube. L’arrivée des nouveaux métiers à tisser devrait réduire le nombre de retouches à effectuer et l’étude d’outillage pneumatique est à l’étude pour améliorer le confort des opérateurs responsables de la découpe.

Toutes les stratégies d’optimisation de la production envisagées reposent fortement sur la présence et l’expertise des opérateurs. La question du recrutement et le management des compétences des employés est donc un enjeu crucial pour le site. Il a fallu à la création de l’usine trouver la main d’œuvre volontaire, la former, et souvent la remettre sur le chemin de l’emploi après une période de chômage – la région ayant été fortement touchée par plusieurs fermetures d’usines et le départ d’un régiment. Des partenariats avec les lycées de la région ont permis d’asseoir une politique de recrutement pérenne qui a permis le recrutement des 400 employés que compte maintenant le site. Le pari semble réussi.

C’est donc remplis de l’optimisme partagé par Messieurs Briffaux et Schweitzer et inspirés par l’exemple de ce projet industriel que nous sommes repartis vers Strasbourg. Non sans un détour par une usine de madeleines.

 

Nos "madeleines"

Nouveauté de cette FAMIA 2018, la promotion 2016 des ingénieurs de l’armement a passé trois jours dans la région Grand-Est. Après une visite du Parlement Européen à notre arrivée à Strasbourg, il a ensuite été question d’aéronefs puisque nous avons visité deux sites de l’équipementier Safran, à Commercy et à Molsheim (Safran Landing Systems), puis le 1er Régiment d’Hélicoptères de Combat de Phalsbourg (Tigre, NH90 et Gazelle). Un peu plus au sud, et pour conclure les trois jours, nous avons été reçus par Christian de Villemagne à l’Institut franco-allemand de recherches de Saint-Louis pour un avant-goût des technologies de défense de demain et une première approche de la coopération internationale. Nous remercions Jérôme de Dinechin et Julie L’Ebraly pour ces trois jours qui auront remporté un franc succès auprès de la promotion et Xavier Sahut d’Izarn (Safran), qui a rendu ces visites possibles. Merci également à nos camarades recrutés sur titres, Charles Jouglard (Mines de Paris) et Jennifer Fongue (SupAéro), qui ont hérité de l’organisation pratique de ce périple pour leur intégration dans le corps.

  

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