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CFO Sat (Chinese-French Oceanic Satellite) premier satellite franco-chinois, lancé fin octobre 2018
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31 mai 2019

TOUR D’HORIZON SUR UNE RÉVOLUTION SPATIALE
LE CNES, ACTEUR MAJEUR D’UN ESPACE EN PLEINE MUTATION

Le Centre National d’Etudes Spatiales joue un rôle central dans la définition et la mise en œuvre de la politique spatiale française. Cette affirmation garde toute sa pertinence depuis bientôt soixante ans alors que l’écosystème spatial français a complètement changé en passant d’une feuille blanche à un ensemble de laboratoires de recherche et d’industries de toutes tailles et de premier rang mondial. Aujourd’hui, la forte accélération de ces évolutions propose un nouveau challenge à relever, plein d’opportunités et de risques.


Les évolutions majeures du domaine spatial

Le constat d’une évolution de plus en plus rapide du domaine spatial n’est pas discutable et s’explique principalement par la révolution numérique qui modifie en profondeur nos sociétés tant au niveau des techniques que des usages et par l’augmentation importante du volume, de la qualité et de la diversité des données mesurées depuis l’Espace.

La combinaison de ces deux éléments permet de proposer de plus en plus de services utilisant des données spatiales dans de très nombreux domaines d’activité (santé, sécurité, aménagement du territoire, pêche, agriculture, tourisme, transports, etc.). Les enjeux très étatiques et fondateurs du spatial (science et sécurité) s’enrichissent donc de forts enjeux économiques à l’instar des télécommunications spatiales qui avaient déjà ouvert cette voie.

Du fait de cette évolution majeure, l’économie étatique et fermée du monde spatial s’enrichit donc d’une économie ouverte où règne une compétition effrénée entre des acteurs privés de plus en plus nombreux, pertinents et intéressés.

Dans le même temps, les enjeux stratégiques du spatial se renforcent partout dans le monde. Ainsi, à côté du rôle naissant des acteurs privés, le rôle des Etats reste très majoritaire et ce d’autant plus que le domaine spatial devient de plus en plus important pour la sécurité des populations, les enjeux de développement économique et la sécurité des systèmes spatiaux eux-mêmes.

Enfin, de plus en plus d’enjeux sociétaux trouvent aussi des réponses dans l’Espace. Au niveau opérationnel, c’est le cas depuis longtemps de la météorologie, mais maintenant se rajoutent la compréhension du changement climatique, de la déforestation ou de la désertification et la gestion des ressources en eau.

Dans un autre registre tout aussi important, le rêve de l’espace lointain, l’envie d’aller explorer plus loin pour comprendre nos origines inspirent nos sociétés et sont des sources importantes de vocations scientifiques.Ainsi, l’Espace et les données spatiales seront demain de plus en plus une nécessité pour tous et partout.

Satellite Konnect VHTS pour couvrir les zones blanches en Internet haut débit (prévu pour 2021)

Satellite Konnect VHTS pour couvrir les zones blanches en Internet haut débit (prévu pour 2021)

Un Cnes réactif

Dans ce contexte, une adaptation importante et rapide du Cnes s’imposait. En effet:

  • les scientifiques du secteur spatial forment une petite communauté avec laquelle le Cnes a l’habitude de travailler depuis toujours; mais s’interfacer avec la communauté des pêcheurs ou des responsables politiques de grandes agglomérations constitue un nouveau métier;
  • les acteurs industriels se diversifient aussi. Développer des systèmes spatiaux avec les grands industriels demande des compétences maintenant bien maîtrisées. Ces interactions évoluent cependant fortement vers plus de partenariat et de plus, il est nécessaire de réinventer certains modes d’intervention du Cnes auprès des nouveaux entrants;
  • le champ des technologies utilisables s’élargit aussi considérablement: miniaturisation des composants, intelligence artificielle embarquée, charges utiles entièrement numériques... Les boucles d’innovation se raccourcissent et les investissements nécessaires pour développer les nouvelles générations de produits augmentent.

Dès 2016, le Cnes a créé la Direction de l’Innovation, des Applications et de la science (DIA) avec plusieurs objectifs:

  • proposer une analyse prospective et assurer une veille du domaine spatial;
  • inciter les acteurs économiques des écosystèmes non spatiaux à développer des applications utilisant des données spatiales;
  • aider le développement des initiatives nouvelles dans le domaine des services comme dans celui des infrastructures;
  • assurer la préparation des futures technologies spatiales en lien avec ces feuilles de route des différents domaines (science, observation, télécommunication, défense);
  • préparer notre société à l’utilisation des outils spatiaux (nouveaux usages, formation).

Une nouvelle Direction du numérique, de l’exploitation et des opérations est créée dès l’année suivante pour regrouper les compétences nécessaires dans le domaine du numérique à la fois pour les enjeux d’entreprise, les segments sol des nouvelles missions spatiales et le traitement des données pour les nouveaux utilisateurs.

Les lanceurs ne sont pas en reste avec deux réflexions intenses lancées sur le futur de la base spatiale guyanaise et le futur des lanceurs européens.

Il faut noter que les ressources humaines du Cnes n’étant pas extensibles, ces évolutions n’ont été possibles qu’en transformant d’autres fonctions afin qu’elles utilisent moins de RH. Ceci est rendu possible par la montée en compétence des industriels du spatial et l’allégement du suivi technique des contrats.

Les données spatiales seront utilisées partout demain

Les données spatiales seront utilisées partout demain

Des résultats concrets et rapides

Moins de trois ans après, les premiers résultats sont bien concrets et montrent l’importance de la capacité d’adaptation et la force de l’intelligence collective du Cnes.

Dans le domaine de l’ouverture du spatial à la société, le projet Fédération est lancé. Sur le modèle des hackers et des makers, ce projet propose à qui le souhaite, de s’emparer de sujets coopératifs touchant aussi bien aux infrastructures qu’aux services spatiaux de demain. Le Cnes est à l’origine de sa création mais n’en est pas maître : le projet Fédération se développe maintenant par lui-même.

Dans le domaine des applications, de très nombreux partenariats sont noués avec de nouveaux écosystèmes: santé, agriculture, navigation autonome... Le Cnes s’est implanté au sein de Station F pour promouvoir l’utilisation des données spatiales. Les travaux entrepris avec ces nouveaux utilisateurs montrent combien le spatial et son potentiel restent méconnus. A chaque nouvel échange, de nouvelles idées d’applications voient le jour.

Pour adosser une aide financière à l’aide technique ou juridique apportée aux nouveaux entrants, le Cnes décide de créer un fonds d’investissement dédié au spatial: CosmiCapital.

De nouvelles méthodes de travail avec l’industrie sont expérimentées: créer une filière française de nano satellites par un travail collaboratif en plateau ou encore monter des projets coopératifs où le partenariat et le partage de coût de possession remplacent l’achat d’un système dans une relation client/fournisseur.

L’enrichissement de notre culture spatiale passe aussi par les échanges avec les autres acteurs mondiaux du domaine. Grâce à des coopérations de tailles et d’ambitions très diverses, le Cnes a aujourd’hui tissé des liens avec tous les acteurs mondiaux du domaine spatial.

Enfin, la formation est un sujet particulièrement important à la fois et pour préparer les futurs ingénieurs dont le spatial aura besoin demain, mais aussi pour préparer tous les acteurs scientifiques et économiques de demain à l’utilisation les outils spatiaux. Le Cnes y prend une part active.

Des réussites emblématiques

Une liste impressionnante de réussites récentes montre que le Cnes, tout en ouvrant de nouvelles voies innovantes pour préparer l’avenir, reste à l’avant-poste de l’excellence avec tout l’écosystème spatial français pour la réalisation et l’exploitation de missions spatiales de références mondiales.

Ainsi, au cours de l’année 2018 seulement, on note: une participation instrumentale importante à la mission euro-japonaise Bepi-Colombo; la commande à l’industrie française du satellite de nouvelle génération et de très grande capacité Konnect pour couvrir les zones blanches internet sur la métropole, le posé du robot Mascot sur l’astéroïde Ryugu en coopération avec l’Allemagne et le Japon; le lancement de la mission CFO-Sat, première coopération spatiale d’envergure avec la Chine; l’atterrissage du sismomètre SEIS sur Mars, instrument principal de la mission InSight du JPL (Jet Propulsion Laboratory, centre de recherche spatiale de la Nasa); enfin, le lancement et la mise à poste du satellite d’observation de défense de nouvelle génération CSO.

Plus de 50% des variables climatiques essentielles sont mesurées grâce aux systèmes spatiaux

Après avoir été à l’origine de la création de l’écosystème spatial français, le Cnes œuvre très activement à son développement. Le spatial sera de-main un atout déterminant pour les nations qui maîtriseront la conception, le lancement et l’utilisation des systèmes spatiaux. Nous pouvons compter aujourd’hui en France sur des compétences uniques et reconnues mondialement, que ce soit au sein de l’agence, des laboratoires de recherche ou dans l’industrie. La multiplication des initiatives privées doit être encouragée mais ne doit pas masquer le fait que le rôle des acteurs institutionnels reste aujourd’hui largement prépondérant pour le développement des activités spatiales.

Ainsi, grâce à ses soixante années d’expérience, son expertise mondialement reconnue et son positionnement toujours adapté et réactif, le Cnes assure les succès d’aujourd’hui et prépare la France spatiale de demain.

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