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05 octobre 2021

LES TECHNOLOGIES FACE AUX DÉFIS DE NOS SOCIÉTÉS

Rarement une crise aura autant fait appel aux technologies nouvelles ou émergentes en un temps aussi court, rarement aussi elles auront suscité autant de résistances et de controverses. Au-delà de la crise actuelle, les défis sont nombreux : changement climatique, transition énergétique, crises sanitaires, alimentation, formation, emploi…. Quelle contribution des technologies, à quelles conditions ?


Les technologies face à la crise de Covid-19

L’apport des technologies au fonctionnement de notre société a été particulièrement mis en évidence à l’occasion de la crise qui nous frappe depuis 2020.

Les technologies du vivant ont été mobilisées pour comprendre le virus, le détecter, et modéliser l’épidémie. Des ruptures technologiques majeures, issues en particulier de travaux de recherche publics et privés sur l’ARN messager, ont permis de mettre au point des vaccins moins d’un an après l’apparition d’un virus.

Les technologies, notamment numériques et de communication, ont joué un rôle déterminant. Les situations de confinement ont conduit à une accélération de leur usage et à une appropriation remarquable.

Faire face aux grands défis de notre société 

La crise sanitaire nous a aussi fait prendre conscience de la fragilité de nos sociétés et de l’importance de les rendre plus résilientes face aux risques auxquels elles seront inévitablement confrontées. Les évènements météorologiques récents avec leurs lots d’incendies et d’inondations catastrophiques ont confirmé, s’il en était besoin la réalité du changement climatique et l’urgence de le prendre en compte.

Réussir la transition énergétique et s’adapter au changement climatique tout en assurant les besoins d’alimentation, d’habitat et de mobilité, répondre aux besoins de santé et aux crises sanitaires, donner accès au plus grand nombre à la formation et à l’emploi, les défis sont nombreux. Ils ont en commun de présenter des dimensions techniques, technologiques, mais aussi sociétales, voire éthiques. Ils constituent des sujets de confrontation entre l’évolution des modes de vie et des impératifs de production alimentaire et industrielle. 

L’exemple des usages numériques

Les initiatives qui ont émergé avec la crise sanitaire vont bien au-delà de simples mesures palliatives de l’absence de mobilité. De nouveaux usages et de nouvelles applications numériques se sont multipliés, notamment dans les domaines de la santé (téléconsultation, traçage des cas contacts), de l’enseignement (téléenseignement), de la production et de la distribution (vente directe de produits frais par les producteurs) ou de l’organisation des entreprises et des administrations (généralisation du télétravail). Ces nouveaux outils constituent des avancées indiscutables dans leurs domaines respectifs ; en témoigne l’appropriation remarquable dont ils ont fait l’objet. Cette expérience permet d’anticiper une transformation durable de ces activités à condition que leurs avantages, patents durant les périodes de restrictions de déplacement ou de regroupement, continuent à s’imposer après le retour à une vie sans contraintes. Cela suppose de disposer d’infrastructures matérielles et logicielles correctement dimensionnées et sécurisées pour garantir un accès à tous, sans sous-estimer les difficultés d’accès au numérique d’une partie de la population (acquisition de matériel, abonnements, usage d’Internet, exiguïté de locaux…).

L’appropriation des innovations technologiques : à quelles conditions ?

Les innovations technologiques peuvent fournir des solutions aux défis de demain à condition d’être acceptées, ce qui suppose que leur apport positif au vu d’un bilan bénéfices/risques soit compris et perçu comme tel par nos concitoyens. 

 

L’Académie des technologies : une activité soutenue durant la crise du Covid-19

L’importance croissante des technologies dans nos sociétés, leur diversité et le caractère transverse des questions posées ont conduit à créer à l’aube du 21e siècle l’académie des technologies ; elle rassemble plus de 300 académiciennes et académiciens, dont quatre prix Nobel, tous expertes et experts dans leurs domaines respectifs, et issus d’horizons très divers : monde de la recherche industrielle et académique, économistes, sociologues, architectes, médecins…

Elle analyse les opportunités et les risques liés aux nouvelles technologies ; elle émet des propositions et des recommandations auprès des pouvoirs publics, des acteurs socio-économiques et des citoyens pour une meilleure exploitation des technologies au service de l’intérêt public en accord avec sa devise « Pour un progrès raisonné, choisi et partagé ».

Elle s’attache à améliorer l’attractivité des métiers technologiques, notamment auprès des jeunes et des femmes. Malgré la crise, cette dernière année a été très intense en travaux académiques et coopérations en France et à l’international.

De nombreux travaux ont été réalisés en commun avec les Académies des sciences, de médecine, d’agriculture et des sciences morales et politiques sur le Covid, les Fake news, la formation scientifique et technologique ou l’intelligence artificielle. Beaucoup d’activités se sont poursuivies à distance, parfois à un rythme plus soutenu qu’auparavant.

En témoignent les dernières publications disponibles sur son site : détection du Covid dans les eaux usées, crise du covid-19 - accélérer la transformation numérique : pour une France plus agile et moins dépendante, rôle de l’hydrogène dans une économie décarbonée, stockage de l’information dans l’ADN, modélisations et données pour la gestion de crises sanitaires, innovation dans les industries alimentaires, impacts de la révolution numérique, science et technologie à l’école primaire : un enjeu décisif pour l’avenir des futurs citoyens.

Si, comme le montre l’enquête annuelle réalisée par l’IFOP pour l’Académie des technologies, une majorité de nos concitoyens ont une vision positive des technologies (61% estiment que le progrès technologique reste synonyme de progrès pour l’humanité et 75% se déclarent majoritairement intéressés par les nouvelles technologies), leur inquiétude vis à vis de ces dernières va croissant. Les Françaises et Français sont désormais une majorité (56%) à se dire inquiets à ce sujet (+ 15 points par rapport à l’an dernier) ; en témoignent les débats sur les vaccins, ou sur la 5G par exemple. Plus de trois quarts souhaitent être plus impliqués dans les décisions sur des technologies controversées (77%) et estiment ne pas être suffisamment informés par les autorités de leurs conséquences (75%). 

Au plan général, seuls 33% estiment être suffisamment bien informés, un chiffre stable. 

Malgré les débats sur l’expertise, ils sont 66% à faire confiance aux « sachants », scientifiques, chercheurs et spécialistes des questions scientifiques et technologiques.

Les réponses aux grands défis qui sont devant nous génèreront sans nul doute d’intenses débats, voire des polémiques notamment sur le recours proposé à des innovations ou à certaines solutions technologiques. Il est essentiel que des informations scientifiques et techniques claires puissent être données, sachant que les points de vue les plus extrêmes auront toujours un grand attrait, notamment médiatique. Les académies ont plus que jamais un rôle à jouer pour apporter des réponses aux questions légitimes qui peuvent se poser et faire face aux vérités alternatives.  

Parmi les publications récentes, https://www.academie-technologies.fr/

 

Edwige Bonnevie

Edwige Bonnevie IGA. Après une carrière à la DGA consacrée à l’utilisation militaire de l’espace, puis à la dissuasion, elle rejoint le CEA en 2001, comme directeur adjoint des applications militaires, puis responsable de la maitrise des risques, de la sécurité et de la sûreté. Membre de l’académie des technologies depuis 2012, elle est déléguée générale depuis 2019.

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