LE BUREAU DES LONGITUDES
UN LIEN FORT ET PÉRENNE ENTRE RECHERCHE ET APPLICATIONS DANS LES SCIENCES DE L’UNIVERS
L’intitulé du Bureau est trompeur : les longitudes au sens commun ne sont plus un problème depuis longtemps, surtout depuis l’avènement des satellites de positionnement, mais le positionnement à la surface de la planète, et plus généralement dans l’univers, est toujours en progrès. Les missions du Bureau sont bien plus étendues, englobant les sciences de l’univers : planète liquide, planète solide, planète gazeuse et espace.
Les académies de l’ancien régime, supprimées en 1793, furent recréées sous une autre forme dès 1795, en commençant par le Bureau des longitudes en juin, suivi par l’Institut en octobre.
Après un rôle plus opérationnel au 19e siècle, avec notamment la supervision des observatoires, le Bureau joue maintenant un rôle traditionnel pour une académie, consistant à rassembler des personnalités de haut niveau dans les multiples domaines des sciences de l’univers. Dans ces domaines, les membres mettent en commun leurs compétences pour émettre des avis sur des questions scientifiques, publier divers ouvrages scientifiques ou historiques et organiser la diffusion de l’information scientifique à destination d’un large public par des conférences mensuelles et des journées scientifiques annuelles(1). Le Bureau conserve une mission opérationnelle pour la publication et la mise à disposition du public des éphémérides astronomiques de caractère national (Annuaire du Bureau des longitudes, Connaissance des Temps et Ephémérides nautiques). Il a la responsabilité scientifique de ces éphémérides dont la réalisation est confiée, depuis 1998, à l’Institut de mécanique céleste et de calcul des éphémérides de l’Observatoire de Paris.
Le “coeur de métier”: l’espace et le temps
Depuis ses origines, le Bureau a été au centre des travaux sur la mesure de ces grandeurs, mesure nécessaire pour situer toute autre mesure sur notre planète ou dans l’espace. Les progrès en précision ont été spectaculaires, puisque l’on est passé des kilomètres il y a deux siècles aux millimètres maintenant. A ces précisions, nos bons vieux continents ne sont plus fixes et la configuration la plus précise est constituée par diverses constellations de satellites orientées par des visées sur des quasars lointains. Pour conserver une précision cohérente sur le long terme, le renouvellement des constellations sans discontinuité est primordial. Le Bureau suit de près tous ces sujets et s’exprime lorsqu’il le juge nécessaire. Il est un des fondateurs du Groupe de recherche de géodésie spatiale et a publié en 2017 un ouvrage qui fait le point sur les “références de temps et d’espace”.
Une Académie ouverte sur les applications techniques
L’une des particularités du Bureau des longitudes est d’accueillir des membres dits “en service extraordinaire” appartenant aux principaux organismes utilisateurs : Centre National d’Etudes Spatiales, Institut national de l’information géographique et forestière, Meteo France, Observatoire de Paris, Service hydrographique et océanographique de la Marine. L’Académie de l’air et de l’espace et l’Académie de Marine sont également représentées de cette manière.
C’est en tant que membre en service extraordinaire au titre du SHOM(2) que j’ai connu le Bureau, qui m’a fait l’honneur après quelques années de m’accueillir comme membre correspondant. J’ai en particulier contribué à l’ouvrage sur Galileo et à celui sur les observatoires et l’observation de la terre.
Les ingénieurs de l’armement et le Bureau des longitudes : une longue histoire
Depuis la création du Bureau, les ingénieurs de l’armement et leurs prédécesseurs, une trentaine au total, y ont été représentés presque exclusivement par les ingénieurs hydrographes. Une exception notable : Jean-Charles Borda (1733 - 1799), un des fondateurs, qui fut officier du génie terrestre, ingénieur du génie maritime et géodésien ; il perfectionna en particulier le cercle à réflexion qui fut l’instrument de base du positionnement précis en vue des côtes pendant plus d’un siècle. Cf. site.bdlg.fr/wp-content/uploads/2019/12/BDL4_Borda.pdf
Parmi cette trentaine, il a fallu faire un choix. Nous en présentons quatre, en donnant aux trois premiers le titre de Directeur du SH(3), même si au 19e siècle leur titre était “hydrographe en chef”. Notons qu’ils débutèrent tous leur carrière par de nombreuses missions sur les côtes de France et outre-mer.
Parmi eux, il faut citer Charles François Beautemps-Beaupré (1766 - 1854) qui fut qualifié de “père de l’hydrographie moderne”. Les méthodes de levé qu’il mit au point pendant l’expédition de d’Entrecasteaux à la recherche de Lapérouse changèrent peu au cours du 19e siècle et il dirigea un grand nombre de levés aboutissant au “Pilote français” comportant 150 cartes de Dunkerque à Bayonne. Il fut Directeur du SH de 1826 à 1848, année de ses 82 ans !
Pour le milieu du 19e siècle, nous retiendrons Anatole Bouquet de la Grye (1827-1909) qui, en plus de nombreux levés hydrographiques, réalisa des observations astronomiques qui lui valurent de recevoir deux prix de l’Académie des sciences. Il fut Directeur du SH de 1886 à 1891. Il participa aux jurys des prix de l’exposition universelle de 1900 et fut l’initiateur d’un projet “Paris port de mer” auquel il consacra beaucoup d’énergie pendant sa retraite.
A la charnière des 19e et 20e siècles, Joseph Renaud (1854-1921) est surtout remarquable par son action internationale qui aboutit à la création du Bureau hydrographique international en 1921. Il fut directeur du SH de 1913 à 1919.
Pour le milieu du 20e siècle, Henri Lacombe (1913-2000) est particulièrement intéressant car, après une vingtaine d’années au SH, il fut l’un des principaux initiateurs de la recherche océanographique en France en créant la première chaire dans ce domaine au Muséum d’histoire naturelle. Il reçut deux prix de l’Académie des sciences.
1 : voir https://site.bdlg.fr/ ou s’inscrire sur la liste de diffusion auprès de : contact@bureau-des-longitudes.fr
2 : Service Hydrographique et Océanographique de la Marine
3 : Service Hydrographique
Des ouvrages scientifiques sur des thèmes critiques.
Yves Desnoës
Yves Desnoës, IGA, a mené une double carrière, consacrée pour moitié à l’environnement marin, notamment au SHOM, dont il a été directeur, et pour moitié aux systèmes d’information. Il a été le fondateur du programme SCCOA - Système de commandement et de conduite des opérations aériennes dès 1986. Il est membre correspondant du Bureau des longitudes et ancien président de l’Académie de Marine.
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