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Luc Rémont, PDG d'EDF
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02 octobre 2023

PRÉFACE DE LUC RÉMONT PRÉSIDENT – DIRECTEUR GÉNÉRAL D’EDF

La série de chocs vécue par le marché de l’énergie, avec les conséquences de la pandémie, la vigueur de la reprise économique qui a suivi, puis de la guerre en Ukraine a montré combien l’énergie était d’abord un enjeu de souveraineté.
Pour faire face à cette situation exceptionnelle, des décisions rapides ont été prises pour garantir la sécurité d’approvisionnement. Parallèlement, un processus de concertation est engagé au niveau européen pour réformer l’organisation du marché de l’énergie, dont la vision essentiellement focalisée sur le court terme a montré ses limites.


Cette conjoncture difficile est renforcée par la nécessaire prise en compte du changement climatique. Tous les analystes l’affirment, une accélération des usages de l’électricité est nécessaire et se traduira par un besoin accru de production d’électricité décarbonée. Nucléaire, hydraulique, solaire, biomasse et éolien…, toutes ces formes de production doivent fournir un mix électrique robuste et performant à l’ensemble de nos concitoyens. EDF fournit déjà une électricité décarbonée à 91% ce qui est évidemment un record mondial, mais notre mission, c’est de nous préparer à répondre à la croissance de cette demande. Pour être au rendez-vous, l’industrie de l’énergie va vivre un cycle d’investissement de grande ampleur, dont EDF sera évidemment l’un des piliers.

Pour le nucléaire, nous entrons dans la phase la plus importante du grand carénage du parc existant avec chaque année un nombre croissant de visites décennales des réacteurs de 30 et 40 ans qui vont permettre la prolongation du parc nucléaire en procédant à des remplacements de gros composants. Il s’agit d’amener le parc nucléaire à fonctionner en toute sûreté au-delà de 60 ans en intégrant des améliorations significatives de sûreté.

Parallèlement s’engage la phase industrielle du programme de nouveau nucléaire avec un premier ensemble de 6 EPR 2, soit une capacité de production supplémentaire de près de 10 GW, dont les travaux du premier réacteur à Penly pourraient débuter début 2024. A ces projets de grande puissance s’ajoute le développement des nouveaux types de réacteurs de plus petite taille (dont le projet Nuward) qui permettront de répondre à d’autres types de besoins.

Un mix électrique décarboné repose également sur des moyens de production renouvelables hydrauliques, éoliens et solaires dont les investissements les plus récents, je pense à l’éolien en mer, apportent sur le réseau des capacités nouvelles, comme les 480 MW du parc éolien de Saint-Nazaire, connectés au réseau début 2023.

Sans oublier les moyens thermiques décarbonés qui apportent un complément précieux au réseau et à l’équilibre en général lorsqu’il s’agit d’avoir de la flexibilité de pointe notamment.

Pour réaliser ce grand programme d’investissement essentiel à souveraineté énergétique de la France, il sera nécessaire de consolider la filière industrielle en particulier dans le domaine nucléaire. Cela recouvre les outils industriels, les compétences humaines et des modèles économiques robustes pour répondre à ces défis.

En matière de recrutement, l’enjeu des années qui viennent porte sur la quantité, pas la qualité. On a entendu le chiffre d’un besoin de 10 000 ingénieurs par an durant 15 ans rien que pour le nouveau nucléaire.

Cette question des compétences d’une filière industrielle n’est pas spécifique à l’énergie. Les enjeux de réindustrialisation se posent dans de nombreux secteurs. Nous devrons apporter des solutions et plus spécifiquement attirer des talents. Les formations existent, mais elles ne sont pas suffisamment remplies. Donc il faut commencer par appeler les talents, les attirer dans les formations techniques et leur donner envie de pratiquer ces métiers.

Le secteur de l’armement, dont je viens, connaît les mêmes enjeux et il me semble naturel qu’il y ait des passerelles entre les deux, qui partagent haute technicité, temps long, importance des investissements et longue durée d’exploitation, auxquels on pourrait ajouter aujourd’hui la numérisation.

Les articles rassemblés dans ce magazine montrent de bien des manières comment l’énergie est devenue un sujet d’intérêt pour les armées, dans différentes dimensions, et j’encourage les ingénieurs de l’armement à continuer de venir apporter leurs compétences en direction de programme et en direction technique en s’ouvrant au domaine de l’énergie.

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