Même s’il ne s’agit plus de bombes – et nous avons notre propre histoire en France sur ce thème – nous retrouvons ces mêmes questions et cette dimension symbolique dans les débats actuels sur l’énergie.

Un domaine de scientifiques ?

Le moins que l’on puisse dire, c’est que la compréhension de ce dont on parle n’est pas intuitive. Qui identifie clairement la différence entre un kilowatt, unité de puissance et un kilowattheure, unité d’énergie ? La proportionnalité entre les deux n’est pas évidente, par exemple pour les énergies intermittentes. Combien de MWh/an une éolienne de 2MW de puissance crête peut-elle produire ?
Côté énergies, comment également comparer un mégajoule, un litre de pétrole, une kilocalorie ou une BTU. Si vous souhaitez tester votre compétence énergétique, nous proposons un jeu montrant quelques ordres de grandeur amusants.

Un domaine d’ingénieurs ?

La remarquable commission parlementaire sur la perte de souveraineté dans le domaine énergétique a mis en lumière le besoin de construire des décisions argumentées en intégrant le temps long. Nous pouvons nous réjouir de voir les corps d’ingénieurs et celui des IA en particulier largement impliqués dans le « nouveau nucléaire ». Plus on y regarde, plus on se rend compte que nos anciens avaient fait des prouesses. Comment reconstruire une ingénierie et une filière industrielle prenant en compte un cadre réglementaire tellement plus exigeant ? Et de manière plus large, comment répondre aux questions de stockage et au besoin de carburants liquides ou gazeux « décarbonés » ?

Un domaine militaire ?

Le soldat connecté consomme et produit une quantité de données qui nécessitent des alimentations, batteries, sources d’énergie supportant les climats de théâtres d’opérations rustiques. Qui ne s’est pas trouvé en panne de portable au plus mauvais moment ? On ne peut l’admettre pour un soldat. Que le service des essences soit devenu le Service de l’Energie Opérationnelle n’est pas anodin.

Mais l’énergie n’est pas que cela. L’énergie matérielle ne se retrouve dans les dictionnaires qu’à partir de 1850 : une force agissante, notamment musculaire. Auparavant, le mot a pour synonymes « efficace, vertu, force », et désigne principalement la force du discours, de la parole : « cet homme a de l’énergie, l’énergie de l’âme ».

En nous concentrant sur l’énergie « esclave » de notre volonté, qu’avons-nous fait de notre force d’âme, dont le Président a rappelé l’importance l’an dernier pour « regarder en face le temps qui vient » ? Celle dont Carl Jung nous parle dans son Livre Rouge en disant « mon âme est un désert car j’ai mis mon désir – mon énergie – dans les choses, les hommes et les pensées » ou encore « aucune culture de l’esprit ne peut faire de mon âme un jardin ».

L’émotion collective qui avait saisi le monde entier lors de l’incendie de Notre Dame de Paris fait partie des sursauts qui nous réveillent l’âme. Illustration dramatique de la lutte entre l’énergie primitive, le feu, et l’énergie spirituelle, la cathédrale, il a provoqué des millions de dons pour une sauvegarde et une restauration. Nous sommes honorés qu’un ingénieur de l’Armement, Philippe Jost, ait été choisi à la suite de Jean-Louis Georgelin pour en faire agir la force.