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État actionnaire
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01 octobre 2016

L’ÉTAT ACTIONNAIRE,
AU SERVICE DES ENJEUX DE SOUVERAINETÉ DE L’ÉTAT

Sous la tutelle du ministre de l'économie et des finances, l'Agence des participations de l'État (APE) incarne l’État actionnaire, investisseur en fonds propres dans des entreprises jugées stratégiques par l’État, pour stabiliser leur capital ou les accompagner dans leur développement ou leur transformation. Le portefeuille de l’APE constitue une part significative du patrimoine de l’État, la valeur de ses participations dans les sociétés cotées dépassant aujourd’hui 60 milliards d’euros. L’APE agit, conjointement avec la DGA lorsqu’il s’agit d’entreprises du secteur de la Défense, à la préservation des intérêts stratégiques de l’État.


Le rôle de l’APE

Partie intégrante de l’administration de Bercy, en tant que service à compétence nationale (SCN), l’APE est une agence composée d’une cinquantaine de personnes, dont quelques ingénieurs de l’armement, notamment affectés dans les domaines liés à la Défense. L’Agence contribue à la préservation des intérêts stratégiques et de souveraineté en cohérence avec la doctrine de l’Etat actionnaire dont les lignes directrices, telles que définies en 2014 (voir encadré), réaffirment que son intervention en fonds propres est justifiée et nécessaire, et qu’elle constitue un instrument au service de la politique industrielle de l’Etat.

Présent au capital des principaux industriels de l’Aéronautique/Défense, l’Etat y endosse un rôle d’actionnaire de premier plan, en tant qu’actionnaire de contrôle (DCNS, GIAT/SNPE/Eurenco), de co-contrôle (Thales, KNDS) ou de référence (Airbus Group, Safran, DCI). Cette présence lui donne un poids important sur les décisions en assemblée générale, et lui confère également une place de premier choix dans les organes de gouvernance (conseils d’administration ou de surveillance), l’Etat devant alors nommer des administrateurs (au sein de l’APE, de la DGA ou en dehors de la sphère publique) capables de remplir le large éventail de prérogatives associées. Partie prenante de la gouvernance de ces sociétés, l’Etat actionnaire peut ainsi peser sur leurs orientations stratégiques (nomination du dirigeant, acquisitions, cessions, partenariats, plan stratégique pluriannuel, etc.), dans le respect de l’intérêt social des entreprises concernées. En s’inscrivant dans une logique actionnariale de long terme compatible des cycles longs de la défense, l’Etat actionnaire contribue à sécuriser et stabiliser le capital en confortant l’ancrage français de la société.

L’APE dispose par ailleurs d’un arsenal juridique lui permettant de garantir la protection des enjeux souverains de l’Etat, à travers les statuts de la société, les éventuels pactes d’actionnaires, les droits conférés au titre des actions spécifiques détenues au capital de Thales, Herakles (filiale de Safran) et Nexter Systems, les conventions ad hoc et la procédure d’autorisation préalable des investissements étrangers en France. A travers les droits conférés par ces dispositions juridiques, la puissance publique dispose généralement des moyens de protéger les actifs qu’elle juge stratégiques, et a fortiori ceux de son périmètre de souveraineté. L’APE est ainsi partie prenante dans la permanence de la protection des intérêts stratégiques de l’Etat, au côté de la DGA lorsqu’il s’agit de la sphère défense.

 

Les objectifs de l’Etat actionnaire

1. S’assurer d’un niveau de contrôle suffisant dans des entreprises à capitaux publics stratégiques intervenant dans des secteurs particulièrement sensibles en matière de souveraineté (activités nucléaires et activités liées à la défense nationale)

2. S’assurer de l’existence d’opérateurs résilients pour pourvoir aux besoins fondamentaux du pays (infrastructures publiques, grands opérateurs de service public « historiques », nouveaux réseaux ou services à déployer)

3. Accompagner le développement et la consolidation d’entreprises nationales, en particulier dans des secteurs et des filières stratégiquement déterminantes pour la croissance économique nationale. Aussi bien pour de très grandes entreprises, que pour des petites et moyennes entreprises ou des entreprises de taille intermédiaire, la présence au capital de l’Etat, actionnaire stable, en direct ou via Bpifrance, peut constituer un élément particulièrement utile dans des phases où le management est confronté à des défis importants.

4. Intervenir ponctuellement en sauvetage lorsque la disparition d’une entreprise présenterait un risque systémique avéré pour l’économie nationale ou européenne, dans le respect des règles communautaires.

 

Trois exemples

  • L’opération KANT (KMW and Nexter Together) : l’APE et la DGA ont joué un rôle central dans la négociation de ce rapprochement afin de définir les règles de gouvernance du nouvel ensemble (définition du pacte d’actionnaires, des statuts et du règlement intérieur du conseil), garantir la protection des actifs stratégiques de l’Etat (création d’une action spécifique au capital de Nexter, négociation d’une convention ad hoc) et obtenir la création d’une JV 50/50 respectant l’intérêt patrimonial de l’Etat. L’APE et la DGA sont directement représentés dans la gouvernance d’Honosthor afin de s’assurer de la bonne mise en œuvre de la gouvernance associée et du rapprochement industriel.
  • La constitution de la JV Airbus Safran Launchers : mobilisée ainsi que la DGA dès l’été 2014, l’APE est intervenue dans cette opération afin de négocier les mécanismes de protections des actifs d’Airbus Group et de Safran transférés à la JV, notamment liés à la dissuasion nucléaire, et pour accompagner la cession de la participation détenue par le CNES dans Arianespace à la JV.
  • La protection du capital de Dassault Aviation : la participation détenue par l’Etat au capital de cette entreprise particulièrement importante de l’industrie aéronautique française ayant été apportée au groupe Aérospatiale en 1998, l’Etat n’a plus joué de rôle d’actionnaire direct jusqu’en 2013 où l’APE a négocié un pacte d’actionnaire concertant avec Airbus Group et acquis une action Dassault Aviation pour le mettre en œuvre, pacte qui lui donnera en novembre 2014 des droits sur la sortie progressive d’Airbus Group du capital de Dassault Aviation, lesquels lui permettront de négocier avec le Groupe Industriel Marcel Dassault (GIMD) des droits sur le capital de Dassault Aviation.

 

Les principales participations de l’Etat 

Société

Taux de détention de l’Etat

EDF

84,94 %

Engie

33,76%

Airbus Group

11 % (via SOGEPA)

PSA Peugeot Citroën

13,68%

Renault

19,74%

Orange

23,04%

CNP Assurances

78,24%

Air France KLM

17,58 %

La Poste

100 %

Safran

15,39%

Thales

25,97%

DCNS

62,49%

RATP

100%

KNDS

50%

ADP

50,63%

SNCF

100%

AREVA

88,41 %

FDJ

72%


 

Un portefeuille stratégique

Produit d’une stratification historique, le portefeuille détenu directement ou non par l’État est aujourd’hui à la fois étendu et très divers, tant au regard des secteurs d’activité concernés que du poids de l’État au sein des entreprises ou des formes juridiques existantes. Avec 77 entreprises relevant de son périmètre, dont 13 cotées, l’APE est présente dans des secteurs aussi différents que l’aéronautique, la défense, l’énergie, les transports, les services (notamment bancaires) ou l’audiovisuel. L’État actionnaire est également en charge de plusieurs défaisances ou entités en extinction. Constitué au fil du temps, ce portefeuille évolue régulièrement, au rythme des cessions ou des prises de participations. L’APE représentait en 2014 un chiffre d’affaires de 143 Md€ (périmètre de combinaison), 102 Md€ de capitaux propres et a reversé 4,1 Md€ de dividende au budget général de l’Etat.

Une vingtaine d’ingénieurs de l’armement sont passés par l’APE dans leur carrière. C’est toujours une expérience passionnante pour comprendre la logique des politiques publiques par le biais de l’économie.

Participation de l'État

 

    
Jean-Séverin Deckers, IPA, Directeur de Participations Adjoint, APE
Après trois ans à la DGA à Bagneux sur les études amonts Satcom et Réseaux, en particulier la préparation de Comsat NG, puis deux ans aux affaires internationales de la Direction générale du Trésor, Jean-Séverin rejoint l’APE en septembre 2013 et y occupe des mandats d’administrateur au sein des conseils de GIAT, SNPE, KNDS et DCI.
 

 

    
Jocelyn Escourrou, IPA, Chargé de participations, APE
Après un premier poste en affectation temporaire dans l’industrie chez MBDA Systems en tant qu’ingénieur systèmes propulsifs aux études amonts, puis un deuxième poste à la DGA d’architecte études amonts turboréacteurs, en particulier sur le programme de drone de combat franco-britannique FCAS DP, Jocelyn a rejoint l’APE en janvier 2016 et y occupe un mandat d’administrateur au sein du conseil de la Monnaie de Paris.
 

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