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Vedette hydrographique en sondage à Apataki (Polynésie française)
16 octobre 2024

LE SHOM AU SERVICE DES TERRITOIRES
ENJEUX ET ENGAGEMENTS

Publié par Julien Simon, IPETA | N° 133 - TERRITOIRES

Au travers de ses missions, le Shom œuvre au profit de l’ensemble des territoires français, hexagonaux comme ultra-marins. De la recherche aux opérations amphibies des forces armées, le service hydrographique national français est un acteur indispensable du développement et de la protection des territoires ; ses savoir-faire et son expertise le placent en première ligne des projets sur le littoral ou l’océan côtier où il fournit les nombreuses données d’entrée nécessaires à la maîtrise de l’environnement.


L’hydro-océanographie, une excellence française

A la lumière des enjeux climatiques, chacun réalise que la connaissance de l’environnement est essentielle et que l’océan est un élément central de la machine thermique Terre. La France, dont les intérêts s’étendent sur de vastes zones en eaux nationales, internationales et étrangères, a ici une responsabilité particulière et compte de nombreux organismes de référence mondiale dont le Shom, l’opérateur public en charge de produire l’information géographique maritime et littorale de référence.

En première approche, en tant que service hydrographique national, le Shom est garant de la sécurité de la navigation au travers des documents nautiques qu’il publie. Mais la qualité et la pertinence des informations qu’il acquiert et détient en base de données lui permettent de traiter de nombreuses thématiques au travers de projets variés et ainsi d’éclairer de son expertise de multiples acteurs de nos territoires.

L’outremer : théâtre central des enjeux maritimes

L’outremer, auquel la France doit sa position de deuxième puissance mondiale en termes de taille de domaine maritime (10,2 Mkm²), est sans surprise un « territoire » central pour de nombreuses problématiques et enjeux.

Ainsi, dans les lagons de Polynésie française, et notamment dans la réserve de la biosphère (UNESCO) de Fakarava, le Shom délimite des zones où le mouillage des croisiéristes et des plaisanciers sera le moins impactant pour la nature, participant ainsi à la protection de l’environnement.

Sécurisation des accès aux îles Eparses par le Beautemps-Beaupré et ses vedettes hydrographiques (©Marine Nationale)

Sécurisation des accès aux îles Eparses par le Beautemps-Beaupré et ses vedettes hydrographiques (©Marine Nationale)

Dans le parc naturel de la Mer de Corail en Nouvelle-Calédonie, le Shom travaille à la définition de corridors de navigation pour préserver les récifs éloignés, prévenant ainsi les risques d’échouement et les catastrophes écologiques qui pourraient en résulter. Dans le même temps les croisiéristes, désireux de diversifier leurs offres, réclament de nouvelles voies d’accès aux lagons ou de nouvelles zones de mouillage.

A plus grande échelle, le Shom planche sur de nouvelles routes maritimes « vertes ». Ces green shipping lanes, basées sur l’étude des courants marins et des vents portant les navires classiques ou à propulsion vélique, contribueront aux projets de décarbonation du secteur maritime pour en réduire l’impact écologique, voire imposeront de nouveaux ports d’escale, créant de nouvelles opportunités de développement de territoires à l’image des anciens comptoirs français.

Si ces exemples concernent nos territoires du Pacifique où il possède deux unités permanentes à Nouméa et Papeete, le Shom se déploie aussi très régulièrement sur l’ensemble des territoires ultra-marins, des TAAF à St-Pierre et Miquelon, de l’océan Indien à l’océan Atlantique.

Un lien essentiel avec les territoires

Les opérations du Shom ne sont pas menées au hasard d’une liste de besoins aussi infinie qu’évolutive mais font l’objet d’un processus de concertation avec les partenaires locaux : collectivités, forces armées, acteurs économiques, etc.

L’enjeu économique est déterminant, et le plus souvent aligné sur les enjeux de sécurité. Ainsi en Nouvelle-Calédonie, les tensions sur l’exportation du nickel imposent d’améliorer la rentabilité du système actuel : l’augmentation du tonnage des minéraliers, et donc de leur tirant d’eau, nécessite de définir de nouvelles voies de navigation ou d’affiner la connaissance des profondeurs des routes traditionnelles.

Le Shom, lorsqu’il n’est pas acteur direct de la solution, peut aussi intervenir pour assister les décideurs. Ainsi la relation étroite avec les territoires a notamment permis d’établir en quelques années le référentiel Litto3D (levé bathymétrique de haute précision réalisé par laser aéroporté) sur l’ensemble du littoral en métropole et outremer avec l’engagement financier des collectivités. Cet outil est essentiel pour éclairer les politiques de développement et d’aménagement des territoires, élaborer les plans d’urbanisation, planifier les espaces maritimes (c’est-à-dire allouer ou interdire des zones par type d’activité), etc.

« Le Shom s’inscrit ainsi dans une démarche de service auprès des collectivités. »

Le rôle de l’État

Dans le domaine des risques naturels, l’État implémente et coordonne les capacités nationales. Ainsi le Shom a reçu la mission de déployer un réseau de marégraphes mesurant et transmettant en temps réel le niveau de la mer sur le littoral français. Ces mesures et les capacités du Shom en modélisation hydrodynamique contribuent à l’amélioration des dispositifs nationaux de prévention des submersions et d’alerte tsunami. Elles permettent également au Shom d’assister les collectivités locales exposées aux risques d’inondation afin de définir des plans d’action cohérents et adaptés aux enjeux locaux. Ces problématiques sont particulièrement prégnantes pour les territoires de la zone intertropicale en raison du renforcement possible de la puissance des cyclones avec le changement climatique.

 

Lorsqu’une catastrophe survient, les levés de reconnaissance rapide de l’environnement (REA, rapid environmental assessment) réalisés par le Shom permettent d’acheminer en sécurité les forces d’assistance et de sécurité par voie maritime.

Chaque année, les exercices Marara et Croix du Sud simulent de telles opérations dans les territoires français du Pacifique. C’est aussi ce type d’opération, réelle en la circonstance, qui fut mené au Liban en 2020 suite à l’explosion dans le port de Beyrouth.

Les rôles des ingénieurs des corps de l’armement

Pour l’ensemble de ses partenaires, le Shom apparaît comme le pourvoyeur d’une ingénierie de haute valeur qu’il est capable de délivrer opérationnellement et dans des délais très contraints.

Les ingénieurs des corps de l’armement qui servent au Shom trouvent ici toute leur pertinence à la fois en raison de leur expertise acquise au travers des embarquements sur les navires hydro-océanographiques, et aussi de leur capacité à assurer le lien entre les experts techniques et scientifiques de l’établissement (qu’ils sont parfois eux-mêmes) et les partenaires locaux, militaires comme civils. Garants de la vision globale et conscients des enjeux, ils animent les réseaux locaux, nationaux et internationaux et sont naturellement impliqués dans les réflexions stratégiques, y compris normatives.

Enfin (surtout !), tous ces services rendus aux territoires héritent d’une mission prioritaire exercée par ces mêmes OCA pour le soutien en environnement sur l’ensemble des domaines de lutte. Mais c’est une autre histoire : celle de la dualité, levier d’efficacité, objet d’un article de cette même revue (n° 129).

Photo de l auteur
Julien SIMON, directeur du groupe océanographique du Pacifique, basé à Nouméa

Il est ingénieur hydrographe au Shom depuis sa sortie de l’ENSIETA en 2006 et a occupé plusieurs postes techniques, en mer puis à terre, à Brest et à Tahiti, avant de devenir responsable de programme puis directeur d’antenne. Il a notamment été chef de la mission de recherche du sous-marin Minerve disparu en Méditerranée en 1968.

Auteur

Julien Simon, IPETA

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