RECETTE D’UN ÉCOSYSTÈME INDUSTRIEL ET ACADÉMIQUE EN RÉGION
Historiquement terre de défense, longtemps associée à l’industrie navale avec Brest, Cherbourg ou Lorient, la région Bretagne compte aujourd'hui plus d'un millier d'entreprises travaillant directement ou indirectement pour la défense nationale, écrivant l’histoire française et européenne du secteur, en couvrant des domaines aussi variés que la mécanique, les télécommunications, l'électronique, le spatial et, plus récemment mais résolument, la cyberdéfense et l'intelligence artificielle (IA).
Le MINARM, une présence historique à Rennes
La ville de Rennes, ville arsenal jusque dans les années 1970, reste une importante garnison avec 3 emprises du ministère dans sa ceinture verte (Foch, Marguerite et Lyautey) et, à portée de vélo, le quartier Stephant (Commandement de la CYBER), le quartier Leschi (Commandement de l’appui terrestre du Numérique et Cyber), le 2 RMAT, le 11e RAMA, ainsi que le site de la DGA/maitrise d’information (DGA/MI) à Bruz qui accueille désormais 2 250 personnes.
Mais la présence du MINARM en Bretagne s’est surtout significativement renforcée ces dernières années par la concentration des forces de la cyberdéfense et la présence, suscitée, d’un écosystème cyber et numérique désormais au deuxième rang national après l’Ile-de-France.
La région compte aujourd’hui plus de 10 000 professionnels du secteur, et ces effectifs sont en très forte croissance, de 10 % à 15 % par an. L’Agence Nationale de la Sécurité des Systèmes d’Information (ANSSI) a récemment inauguré des locaux pour accueillir près de 200 collaborateurs. Des initiatives telles que la Breizh Cyber Alliance (déclinaison du Campus cyber parisien) et le CSIRT régional (Breizh Cyber) témoignent du dynamisme local en matière de sécurité numérique. COMYBER et DGA/MI inaugureront de nouveaux locaux en 2025.
Les grands groupes industriels du numérique (Thales, Airbus, Sopra Steria, Capgemini, Orange, entre autres) renforcent leur présence dans la région, attirés par un écosystème en pleine expansion. Près de 130 entreprises spécialisées dans le numérique sont aujourd’hui implantées en Bretagne, dont 50 % sont des « pure players » dans le domaine de la cyber.
Sur le plan académique, l’ambition est de devenir un leader européen en matière de recherche et de formation en cyber. Ce dynamisme et les relations établies avec le MINARM ont permis à différents partenaires Bretons de remporter des appels à projet de France 2030 avec Cyberskills4all (2022) ou Sequoia (2023) et l’offre de formation locale s’est considérablement étoffée avec des écoles d’ingénieurs comme l’ENSIBS, l’ESNA et la CyberSchool.
La recette de cette réussite
Essayons donc de reconstituer cette odyssée de 10 ans par le menu.
Toute recette commence par des ingrédients : l’émergence de cet écosystème a reposé sur plusieurs facteurs déterminants :
Un soutien institutionnel fort : dès 2010, le rapport Pénillard incite le président de la République à renforcer les activités cyber nationales. Il choisit la Bretagne.
Un terreau breton fertile : des compétences en électronique et en sécurité des systèmes d’information, l’ancêtre de la cyber (DGA/MI s’appelait alors le CELAR - Centre d’électronique de l’Armement) et en télécommunications (France Telecom en particulier à Lannion) ;
Un alignement État (ministère) / région : en 2012 le nouveau ministre de la défense est… président du conseil régional de Bretagne ;
Une vision stratégique, volontariste et partagée prenant en compte toutes les dimensions (industrielle, européennes et internationales, recherche, formation) d’un écosystème, et qui a conduit à la création de 3 entités tout à fait originales et uniques :
En 2014, le pôle d’excellence cyber (PEC), fondé par le MINARM et la région Bretagne, association regroupant acteurs privés et publics, civils et militaires, industriels et académiques, qui regroupe désormais 126 membres, 13 partenaires et organise 8 événements par an, dont l’European Cyber Week ;
En 2014 également, un accord général de partenariat (AGP) pour la partie académique ;
Plus récemment en 2019, en lien avec le COMCYBER, une cyber Défense factory au fonctionnement original pour favoriser l’émergence de « jeunes pousses » cyber
Des financements (qui aident à développer la philanthropie de nos industriels).
Des ingrédients ne faisant pas une recette, il a fallu animer l’ensemble avec :
Des marchés publics certes passés à l’échelon national mais majoritairement réalisés en région ;
Un évènement désormais reconnu comme l'un des rendez-vous majeurs du secteur, l’European Cyber Week (ECW), organisée par le Pôle d'excellence cyber (PEC) et où la Direction générale de l'armement (DGA) joue un rôle clé, notamment en pilotant les conférences techniques.
Un soutien à la recherche et à l’innovation : financement de thèses, de colloques et de séminaires thématiques, principalement dans le cadre de l'Accord général de partenariat (AGP),
Des jeunes pousses incubées dans la cyber defense factory et qui passent à l’échelle : GLIMPS, spin-off de DGA/MI, SAHAR, Oversoc…
Des jeux cyber en compétition - Capture the Flag (CTF) : le BreizhCTF est le plus grand événement de ce type en France.
Enfin, avant de dresser, il a fallu mitonner une décennie durant, sans cesser de mélanger et d’entretenir le feu.
Des défis à relever et des perspectives prometteuses
A la dégustation, le MINARM (DGA et COMCYBER) dispose en région d’un écosystème industriel et académique absolument unique et adapté à ses besoins. C’est le résultat d’une action volontariste conséquente, d’une vision structurée et d’une ambition partagée avec la région Bretagne depuis 2010 dans le cadre d’un dialogue toujours excellent depuis lors.
Quelques surprises dans la recette : l’herbe est verte en Bretagne. Tout le monde est en croissance et recruter devient un challenge dynamisant.
Ce menu invite à une suite avec le développement de l’intelligence artificielle. Elle a commencé avec DGA/MI, elle se poursuit avec la création en 2023 de l’Agence Ministérielle de l’IA de Défense (AMIAD). La région en a déjà fait une priorité, les ingrédients sont présents, mais cette nouvelle recette reste à écrire!
Après un passage au commandement des opérations spéciales, Lionel a d’abord eu un parcours très naval (directeur des programmes HORIZON puis FREMM) avant d’œuvrer dans les technologies de l’information et la cyberdéfense, UMESIO puis DGA Maitrise de l’information, centre de la DGA situé à Bruz près de Rennes.
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